ENCADREMENT DU BATAILLON LE 2 AOUT 1914

 

État-major

 

        Chef de Bataillon GIRARD         Commandant

        Lieutenant         LINEL                Officier adjoint

                -              CUNY                Officier de détails.

  - VOGEL   Officier d'approvisionnement.

                -        TOURRET         Commandant la section de mitrailleuses

        Médecin-major ARNOULD

Méd. aide-major D'HALLUIN

 

1ere compagnie

Capitaine VITAL

Sous-lieutenant         EVRARD

-CHRETIEN

        -         FRAENCKEL

 

2e compagnie

Capitaine PERROT

Sous-lieutenant         BONNEF

-HÉMART

        -        PAGNIEZ

 

3ème compagnie

Capitaine VOGIN

Sous-lieutenant LEROY

        -        SUEUR

        -        BENOIT

 

4e compagnie

Capitaine DE MAISMONT

Sous-lieutenant BLAIZOT

        -        ROBERT

        -        LEFEBVRE

 

5e compagnie

Capitaine LAMBERT

Lieutenant DUPRET

Sous-lieutenant         GENNEVOIS

-PALMADE

 

6ème compagnie

Capitaine LIBAUD

Sous-lieutenant PRUVOST

        -        RENARD

        -        JONGLEUX

 

LE
18ème BATAILLON DE CHASSEURS À PIED

PENDANT

LA CAMPAGNE 1914-1918

 

 

 

LA COUVERTURE
(31 juillet-17 août 1914.)

La tension politique qui occupe les derniers jours de juillet 1914 ne laisse aucun doute sur l'issue des négociations entreprises pour empêcher la guerre. Derrière les exigences de l'Autriche, on devine les appétits allemands. Après Tanger, après Casablanca et après Agadir, le Kaiser a enfin trouvé le prétexte qu'il cherchait. Les plus incrédules commencent à comprendre pourquoi l'Allemagne a augmenté son programme militaire en 1912. Il y a de la poudre dans l'air. Cependant tout le monde est calme; à cette approche de l'heure décisive, l'âme de la Patrie passe dans tous les coeurs. Ce n'est pas en vain que le soldat français a été proclamé le plus brave du monde, et chez les plus humbles comme chez les plus ignorants dix siècles de gloire montent au cerveau comme une ivresse. « Si les Allemands veulent la guerre, ils l'auront. » La Russie, du reste, est avec nous, et l'Angleterre ne va-t-elle pas se déclarer contre l'Allemagne?

Le 31 juillet, à 4 heures, l'alerte de guerre sonne à Longuyon. Rapidement chacun se prépare et, pendant trois heures, le quar­tier, comme une vaste ruche, donne le spectacle d'une activité prodigieuse et ordonnée. Puis le calme s'établit. Les compagnies dans leur rue sont rassemblées, les capitaines aux têtes des bâti­ments. A 7h30, la masse bleu sombre s'ébranle vers Arrancy et vers Spincourt. Au deuxième coude de la route, des têtes se retour­nent. Quels sont ceux qui reverront ces bâtiments où l'on a vécu paisiblement attendant « la classe » et insouciant du lendemain. C'est la lutte maintenant où le plus fort, le plus prêt, le plus volon­taire l'emporte. Ce sera dur, mais la guerre sera courte : tout le monde en est persuadé.

Le sacrifice est consenti allégrement. On fera son devoir. Mieux encore : on sera vainqueur.

Le Bataillon se déroule maintenant entre les moissons par cette chaude journée de juillet. La fièvre des préparatifs étant tombée, chacun pense à ce que va être le choc. Les officiers, les gradés regardent au loin, cherchant sur les crêtes des silhouettes de cavaliers, les Feldgrau d'outre-frontière.

On est bientôt sur les emplacements de couverture : à Avillers, le groupement LAMBERT (2e, 5e) donne la main au 8e Bataillon de chasseurs qui a quitté Etain le matin même, - à Saint-Pierre­villers, le groupement LIBAUD (ler, 6e) voisine avec le 9e Bataillon de chasseurs qui couvre Longuyon, à cheval sur la Chiers. A Spincourt, les deux compagnies disponibles avec la section de mitrailleuses restent auprès du Commandant GIRARD. On les connaît bien ces emplacements sur lesquels maints exercices se sont déroulés. Ce sont maintenant des « manoeuvres avec feux réels » que l'on est destiné à faire et, à cette pensée, un petit frisson parcourt ceux qui réfléchissent - tous à cette heure solennelle. Peur ? Non, mais curiosité. Quelle impression fera la première balle ?... et le premier obus ?...

Les événements se précipitent : le 1er août, parvient l'ordre de mobilisation générale, le 4, on est avisé que les relations diploma­tiques sont rompues. Aucun journal n'arrive plus. Des renseigne­ments circulent... Cette fois, c'est la guerre !

On ne voit du reste aucun ennemi. Au loin, nos patrouilles de cavalerie prennent le contact à Fillières, à Mairy, à Joppecourt, à Bazailles. Des masses de cavalerie ennemie ont été vues; leurs escadrons de couverture s'approchent peu à peu, le 6, le 7. Nos patrouilles ou reconnaissances les dispersent à Avillers (patrouille SOURISSEAU), à la Haute-Borne (reconnaissance RENARD).

Le 8, l'ennemi attaque. Toute une division de cavalerie, appuyée par du canon et deux bataillons d'infanterie environ, pousse de l'avant. Après avoir contenu l'adversaire par ses feux, le 18e, conformément aux ordres reçus, se replie par échelons, et gagne Mangiennes. Il vient en réserve à Peuvillers, où est le Q. G. de la Division. En avant, le 91e d'infanterie continue la mission de couverture, pendant que s'achève notre concentration.

L'effort du Bataillon est signalé dans l'ordre n°2 de la 4e Divi­sion en date du 8 août :

Depuis plus d'une semaine, les 9e et 18e B. C. P. sont continuelle­ment en alerte, de jour comme de nuit, au contact immédiat de l'ennemi. Aucune des patrouilles de cavalerie allemande ne les a approchés sans recevoir une leçon; un certain nombre de cavaliers ennemis ont été ou tués ou blessés, dont au moins un officier; plusieurs ont été faits prison­niers et les chasseurs ont montré un entrain et un allant dont le général de division est très fier et dont il tient à les remercier de suite. Il leur envoie toutes ses félicitations.

     Signé : Général RABIER

Un combat a lieu le 10 à Mangiennes et à Pillon. Les échos en viennent jusqu'à Peuvillers, où chacun attend, anxieux, le résultat. Des bruits courent : les Allemands seraient battus, repoussés - on voudrait bien y croire, ce serait naturel d'ailleurs - mais déjà tant de bruits ont circulé !.. Tout à coup, des artilleurs traînant des canons allemands - les premiers - traversent le village, des mitrailleuses suivent. C'est la joie, le sourire sur tous les visages. Le général CORDONNIER apparaît : « Venez, mes chasseurs, que je vous raconte ce qui s'est passé hier. » On accourt, on entoure le général. Allons, la guerre sera bientôt terminée... D'ailleurs on va attaquer.

 

 

 

L'OFFENSIVE DE BELGIQUE
(18 au 22 août 1914)

Le 18 août, la marche en avant commence. Une première étape conduit le 18e à Othe. Le 21 août, la frontière est franchie, et le Bataillon entre en Belgique, couche à Sommethomme d'où il repart le matin du 22 pour attaquer l'ennemi.

C'est à Bellefontaine qu'a lieu le premier choc pendant que ce village, pris par le 120ème d'infanterie, devient le centre d'un combat d'une extrême violence, le Bataillon, à la droite de la D. I., contient, en avant de La Hage, les mouvements débordants de l'en­nemi, qu'il parvient iuêmo à rejeter par une contre-attaque à laquelle prennent part les 2e, 3e et 4e compagnies, ainsi que la section de mitrailleuses. Le champ de bataille nous reste. Dans les maisons de Bellefontaine s'installe le gros du Bataillon cepen­dant que des unités au bivouac couvrent le P. C. de la Division à La Hage. Première victoire, chèrement payée sans doute, mais l'ennemi a reculé. Et l'on se félicite et l'on escompte des lendemains glorieux.

Mais les renseignements venus des voisins sont mauvais. Si le combat de Bellefontaine a eu une issue heureuse, sur presque tous les autres points où se sont choquées les deux armées, nos troupes ont dû se replier. Et la Division évacue à son tour dans la nuit le terrain si péniblement acquis pour gagner Gérouville. Au jour, les derniers éléments du Bataillon se replient, ramenant avec eux les débris de la 1re Division coloniale rompue à Rossignol. On apprendra plus tard que l'ensemble des actions livrées ce jour-1àî porte le nom de Bataille de Charleroi et que cette bataille marqua le terme de notre offensive en Belgique. Pour la 4ème Division, le 22 août est et restera toujours l'anniversaire du combat victorieux de Bellefontaine, consacré par l'ordre général n° 9 du 2e corps d'armée :

La 4e D. I. et le 19e Régiment de Chasseurs, après avoir supporté, les jours précédents, des fatigues exceptionnelles, sont arrivés, le 22 août dans la matinée, à Bellefontaine, un combat violent s'est aussitôt engagé.

Entendant la canonnade derrière elle, sans nouvelles du reste du 2e C.A. engagé lui-même à Villers-la-Loue, supportant sans faiblir de grandes pertes, mais en infligeant de plus grandes encore à l'ennemi, ces troupes, après avoir lutté pendant neuf heures, sont restées à la nuit maîtresses de Bellefontaine, ce qui leur a permis de se dégager, malgré la supériorité de l'adversaire, sans perdre un canon, ni une voiture, et de venir rejoindre la 3e D. I. qui avait elle-même soutenu un brillant combat à Villers-la-Loue.

Le général commandant le 2e C. A. félicite le général commandant la 4e division et les troupes sous ses ordres des qualités de courage et de ténacité dont tous ont fait preuve et qui sont le gage de prochains succès.

      Signé : GÉRARD.

 

 

 

LA RETRAITE DE BELGIQUE
(23 août-4 septembre 1914)

A partir du 23 août, commence le grand mouvement de repli qui doit nous conduire à la Marne. Moins vivement pressée que le reste de l'armée française, la IVe armée recule lentement, conte­nant l'ennemi, reprenant parfois l'offensive, en belle ordonnance toujours, manoeuvrant et ne laissant en arrière ni troupes ni ma­tériel.

A Avioth, où le Bataillon se trouve le 25, un coup de fusil heu­reux de l'excellent tireur qu'est le sous-lieutenant BENOIT, nous met en possession, en abattant l'officier d'état-major qui les por­tait, de documents de la plus haute importance, concernant les mouvements de deux corps d'armée allemands. Renseignés à temps, les éléments d'arrière-garde peuvent se dérober à l'étreinte des forces ennemies et se diriger vers la Meuse. Le Bataillon la franchit à Stenay (son ancienne garnison) dans la nuit du 25 au 26, prend part les 27 et 28, dans les bois du Dieulet et du Jaulnay, à une contre-attaque qui rejette les Allemands sur la rive droite de la rivière, mais, une fois encore, les insuccès des troupes voisines obligent la Division à une retraite qu'elle exécute à contrecœur.

De Verpel et d'Imécourt où le Bataillon stationne, le 30 août, il se reporte en avant sur Authe où un nouveau combat est livré le 31 : simple coup d'arrêt pour les troupes allemandes. C'est la dernière des contre-attaques de la IVe armée. Rapidement, la Division se dérobe par le défilé de Grand-Pré et la lisière ouest de l'Argonne pour ne s'arrêter que sur la Saulx le 5 septembre.

C'est la Bataille de la Marne.

Le Commandant GIRARD, qui avait conduit le Bataillon sur les premiers champs de bataille, vient d'être nommé lieutenant-colonel et prend le commandement du 120e d'infanterie. Il fait ses adieux au Bataillon, à Chevières, le ler septembre. Le Chef de Bataillon BRION, du 147e d'infanterie, reçoit le commandement du 18e Batail­lon de Chasseurs.

 

 

LA BATAILLE DE LA MARNE
ET LA RETRAITE ALLEMANDE
(5 septembre-18 septembre 1914)

« Au moment où s'engage une bataille dont dépend le salut du pays, il importe de rappeler à tous que le moment n'est plus de regarder en arrière ; tous les efforts doivent être employés à attaquer et refouler l'ennemi. Une troupe qui ne peut plus avancer devra, coûte que coûte, garder le terrain conquis et se faire tuer sur place plutôt que de reculer. Dans les circonstances actuelles, aucune défaillance ne peut être tolérée. »

6 septembre 1914

Général JOFFRE

 

La retraite avait été lugubre. Nulle part on n'avait senti de supé­riorité chez l'adversaire et. cependant on reculait ! Jusqu'où irait-on ? Allait-on abandonner ainsi la moitié de la France à l'ennemi ? Pourquoi ne se battait-on pas ?

Le 5 soir, la nouvelle circula rapidement : « On fait tête. » Le lendemain, la bataille commençait.

Posté le long de la Saulx, de Pargny à Sermaize, le Bataillon dispute pendant deux jours les passages de la rivière et du canal aux troupes du XVIIIe Corps de Réserve allemand.

On se bat au pont du canal, à la ferme Ajol, à la Tuilerie de Pargny. Le capitaine DE MAISMONT est tué, au passage à niveau de la voie ferrée. Attaqué vigoureusement de front, débordé sur ses ailes, le Bataillon abandonne, le 7 au soir, la ligne de la Saulx pour se reporter sur le front Maurupt-Cheminon où, pendant deux autres journées, se livrent des combats sous bois. Le 10, au petit jour, l'ennemi tente un suprême effort. Il lance sur Maurupt cinq régiments d'infanterie, réussit à enfoncer la garnison du village dont il est maître un instant, mais il est aussitôt contre-attaqué et la journée se passe en une série d'actions extrêmement violentes qui ont pour résultat d'arracher à l'adversaire les restes fumants de Maurupt et de le rejeter dans le bois. Le 18e y prend une part glorieuse ; à la fin de la journée, beaucoup des siens sont restés sur le champ de bataille qui demeure, de l'avis de tous, l'un des plus impressionnants de la guerre. Là sont tombés le capitaine PERROT, le capitaine CARRIN, le lieutenant LINEL, les sous-lieutenants PAGNIEZ, LEFEBVRE et SUEUR ; le lieutenant BONNEF et le sous-­lieutenant SOURISSEAU sont grièvement blessés.

Près du tiers des unités qui ont combattu en ce point est mis hors de combat.

Mais grâce à l'effort fourni, l'adversaire n'a pu enfoncer notre front, et ce village de Maurupt marque la limite de son avance. Dans la nuit, il se replie ; la journée du 11 se passe sans qu'il renou­velle ses attaques et, le 12, au matin, c'est la poursuite qui com­mence, cependant que dans les rangs circule l'Ordre du général JOFFRE, le premier Bulletin de Victoire :

La bataille qui se livre depuis cinq jours, s'achève en une victoire incontestable. La retraite des Ire, IIe, Ille armées allemandes s'accentue devant notre centre et à notre gauche. A son tour la IVe armée ennemie commence à se replier au nord de Vitry et de Sermaize.

Partout l'ennemi laisse sur place de nombreux blessés et des quantités de munitions. Partout on fait des prisonniers.

En gagnant du terrain, nos troupes constatent les traces de l'intensité de la lutte et de l'importance des moyens mis en action par les Alle­mands pour essayer de résister à notre élan. La reprise vigoureuse de l'offensive a déterminé le succès.

Tous, officiers, sous-officiers et soldats, avez répondu à mon appel. Tous vous avez bien mérité de la patrie.

      Signé : JOFFRE.

 

Allégrement, le Bataillon, avant-garde de la division, se lance à la poursuite de l'ennemi. Le matériel abandonné témoigne de la hâte de ce dernier à se dérober. Le 12 au soir, le 18e est à Nettan­court, le 13 à La Neuville-au-Bois, le 14 à Sainte-Menehould. C'est la route même qu'il avait suivie, la mort dans l'âme, peu de jours avant. Les rôles sont inversés maintenant. Devant nous fuit l'ad­versaire, non sans achever le pillage des maisons, n'ayant pas toujours le temps de boire toutes les bouteilles qu'il a fait ras­sembler. Les habitants nous accueillent avec joie, nous content leurs angoisses et les mauvais traitements subis. A Sommeilles, encore fumant au moment où le Bataillon y est arrivé, les destruc­tions sont plus considérables encore qu'à Sermaize qui se trouvait cependant en pleine bataille. La rage de l'ennemi s'est donnée là libre cours et, dans une ivresse de destruction, il n'a pas laissé, dans ce beau village, une seule maison debout. Sept personnes ont été retrouvées brûlées dans une cave. Et au spectacle de tant de ruines, la haine de l'envahisseur pénètre profondément dans le cœur de chacun. Ce n'est plus l'Allemand, ce n'est pas le « Prussien », comme le nommaient les vieux, ceux de 70, c'est le « Boche », et ce terme méprisant restera jusqu'au bout son titre, que d'autres dévastations sauront bientôt consacrer.

Le 15, des résistances se font sentir : l'ennemi est arrivé sur une ligne organisée. Le corps d'armée attaque sur deux points Binarville-Servon. Glissant de l'un vers l'autre, le Bataillon se trouve dans l'après-midi engagé dans l'attaque du second de ces villages d'où nos premiers éléments d'infanterie viennent d'être repoussés. Il s'avance jusqu'aux lisières sans pouvoir y pénétrer. Les attaques reprennent le 16, mais l'ennemi s'est renforcé et, ap­puyé par une puissante artillerie lourde, maintient ses positions. Le 17, le combat continue. Une attaque de nuit est arrêtée à 60 mètres par des feux violents. Le Bataillon cède la place à d'autres troupes qui ne sont pas plus heureuses.

Là aussi nos pertes ont été très lourdes : les sous-lieutenants BENOIT, CARUELLE, GUILLEMONT, les adjudants BRIARE, MAGINOT, plus de 250 sous-officiers et chasseurs sont tombés dans la prairie qui longe l'Aisne ; de nombreux blessés ont été dirigés sur le poste de secours de Saint-Thomas.

Jusqu'au 24, les attaques du Corps d'armées se succèdent, mais se heurtent a une résistance habilement organisée. Nos troupes se terrent ; à leur tour elles creusent des tranchées profondes, font des boyaux de communication, des épaulements de pièces ; de part et d'autre, le pelle et la pioche alternent avec le fusil et le canon. C'est la « guerre des tranchées », dira-t-on bientôt. C'est la guerre active, farouche, cruelle, dans laquelle chacun guette son ennemi, dans laquelle on fait peu de quartier. C'est la guerre qui durera des années, et pendant cette période « d'usure » les deux peuples mettront tout en oeuvre pour vaincre : énergie et dévoue­ment de la race, ressources du sol ou de l'industrie, alliances ; ils se replieront sur eux-mêmes, augmentant leur production, jusqu'au moment où, armés jusqu'aux dents, ils se jetteront l'un sur l'autre dans une gigantesque bataille de six mois (mars - novembre 1918).

 

 

L'ARGONNE
(Septembre 1994-février 1915.)

Les débuts de cette forme de guerre sont pénibles. Mieux pré­paré à remuer la terre, l'Allemand nous est. d'abord supérieur, mais le Français s'adapte vite, et on lutte bientôt à armés égales. En face de nous sont d'excellentes troupes, animées du désir de pc:reer, de reprendre cette marche sur Paris, but des armées ad­verses, qu'une longue et savante éducation avait su incruster dans toutes les âmes allemandes comme un article de foi. Surexcités encore par la présence du Kronprinz allemand, ces régiments font preuve d'un esprit combatif remarquable, attaquant sans cesse, employant dans ces attaques l'arsenal compliqué de leurs engins.

C'est le triomphe de la guerre de mines et du combat à la grenade. Les lignes sont poussées au contact. La splendide et calme forêt couvre de ses arbres séculaires une lutte âpre et nerveuse, étouffant sous son feuillage les fusillades interminables, les explosions des bombes et les hourras des troupes d'assaut. Le 2e Corps d'armée tient bon, malgré les attaques répétées. Il ne perd pas de terrain, attaque à son tour et fait lâcher prise à l'ennemi. Des félicitations du Général commandant en chef viennent témoigner de sa superbe tenue au cours de ce premier hiver de campagne.

Le Général commandant l'Armée est heureux de porter à la connais­sance de tous les corps et services de son commandement la lettre sui­vante qu'il a reçue du Général commandant en chef :

« Vous m'avez rendu compte au jour le jour des preuves d'énergie et de ténacité que n'a cessé de donner le 2e C.A. établi depuis cinq semaines dans la forêt de l'Argonne.

Violemment assailli par un adversaire en force, tour à tour à La Chalade, au Four-de-Paris, à Saint-Hubert, le 2e C.A. a victorieuse­ment résisté à toutes ces attaques en faisant subir à l'ennemi des pertes considérables.

Hier encore, une brigade ennemie attaquant ce corps sur Baga­telle a été repoussée, puis vigoureusement contre-attaquée.

Je vous prie de transmettre au Général commandant le 2e C.A. et à ses troupes toutes mes félicitations. »

      Signé : JOFFRE.

 

 

Les corps de la 4e division ont joué un rôle important dans ces combats, ainsi qu'en témoigne l'ordre de la 4e D.I., n° 25 :

« En me transmettant l'ordre no 113 du Général commandant l'Armée du 26 octobre et l'ordre n° 23 du 2e C.A. du 27 octobre, le Général com­mandant le 2e C.A. m'adresse la lettre suivante que je suis heureux de porter à la connaissance des troupes placées sous mes ordres :

Dans les opérations dont il a été rendu compte journellement aux autorités supérieures et qui ont mérité les éloges du Commandant en Chef, la 4e Division a pris une part prépondérante aux succès remportés dans l'Argonne.

Je tiens à le mentionner d'une façon toute spéciale en vous adressant à vous personnellement et aux troupes que vous commandez, l'expres­sion de ma satisfaction et de ma gratitude. »

      Signé : RABIER.

 

Dès le début, le 18e a l'occasion de se signaler par une action d'éclat.

Placé à La Chalade, en flanc-garde du 2e C.A., il y est attaqué, dans la soirée du 28 septembre, par un détachement de deux batail­lons du 98e d'infanterie allemande qui ont hardiment poussé en avant de 5 kilomètres en profitant du couvert des bois. Réduit à trois compagnies (1er, 2e, 3e) et à sa section de mitrailleuses, le Bataillon tient tête à l'ennemi en défendant le village pendant toute la journée du 29 ; la 5e compagnie est rappelée de la Maison forestière et chargée d'une attaque de flanc, mais l'épaisseur du fourré et le peu de temps dont elle dispose l'empêchent d'aborder l'adversaire. Le 30 au matin, le Bataillon, renforcé de quatre com­pagnies du 87e, reprend l'attaque, culbute l'ennemi, lui fait une cinquantaine de prisonniers, s'empare de deux mitrailleuses et de leurs caissons, d'un important matériel et rejette sur Barricade les débris des deux bataillons allemands.

La 5e compagnie, qui a mené l'attaque, a eu un rôle particulière­ment brillant. A sa tête, le sous-lieutenant GENNEVOIS est tombé en criant à sa section : « En avant, les chasseurs ! Vive la France! »

La Ire compagnie, avec trois compagnies du 313e, poursuit l'ad­versaire et pousse en avant jusqu'à La Fille-Morte, où elle rejoint la 4e et prend part pendant une semaine à toutes les attaques sur Barricade-Pavillon.

A partir d’octobre commence « l’occupation des secteurs ». C'est d'abord La Fontaine-aux-Charmes, du 2 au 10 octobre, puis Le Four-de-Paris, où le Bataillon restera jusqu'au 28 novembre, harcelant sans cesse l'ennemi, avec ses quatre compagnies, que dirige le capitaine Zeil, cependant que les 3e et 6e sont avec le 9e Bataillon dans le secteur dit «de liaison». C'est au Four-de-Paris que les mineurs de la 1re compagnie, lassés d'entendre « jacasser » une mitrailleuse en avant d'eux, forment le projet de la faire sauter. Ils creusent une galerie, y passant des jours et des nuits, car la relève approche. Et surpris par cette relève, ils demandent à rester encore, pour « voir le résultat ». C'est au Four-de-Paris que font leur apparition les premiers abris-cavernes, les « sapes profondes » qui bravent les « marmites » allemandes et c'est là aussi qu'habite le premier « Fritz » qui, d'un implacable coup de feu, interdit 60 mè­tres de la route de Vienne-le-Château aux Islettes, compliquant à plaisir par cet acte d'une simplicité déconcertante le jeu des relèves et des ravitaillements.

C'est ensuite Fontaine-Madame où le 18e passe sept jours dans une situation précaire, une mine sous les pieds, accroché à des pentes que l'ennemi voit et arrose. Là encore, on travaille. on s'enterre, et on se bat. Le 65 de montagne, le canon de 47 de marine mêlent leurs obus aux grenades Marten-Hale et aux « boîtes de singe » emplies de cheddite. Tout est bon pour envoyer chez le Boche. Mais celui-ci ne gagne pas un pouce de terrain.

Le 17 décembre, c'est le ravin du Mortier. L'ennemi a percé et le 18e contre-attaque. Un nouveau front est créé en peu de jours, après un effort considérable. Nous avons maintenant acquis l'expérience et nos tranchées résistent. Le front du Mortier restera inviolé jusqu'à la fin de la guerre.

Saint-Hubert couronne la série des secteurs d'Argonne. Situation analogue à celle de Fontaine-Madame, avec l'aggravation d'un terrain argileux et de tranchées sans cesse inondées. Et cependant le saillant, le V de Marie-Thérèse, est menacé par des travaux de mine que l'on entend distinctement. La 4e compagnie passe une semaine sur un volcan : celui-ci n'explosera qu'un peu plus tard.

Le 17 janvier, le 2e C.A. va au repos, mais la 87e Brigade « prêtée » au 5e C.A. reste en arrière des premières lignes. Le 18e retourne à La Chalade, théâtre de ses anciens exploits. Il y est quotidiennement canonné, y fait des travaux et de l'instruction, se reconstitue. Le 19 février, il est enlevé en chemin de fer et transporté au sud de l'Argonne où il parcourt une série de villages, cantonnements passagers : Vieil-Dampierre, Sivry-sur-Ante, Braux ­Saint-Remy, Rapsecourt. Déjà on sait que l'on est destiné à prendre part-à une grande offensive, en Champagne, et pendant que se battent quotidiennement en Argonne les régiments du 32e C.A. qui y ont remplacé ceux du 2e, le canon gronde au nord-­ouest et des troupes nombreuses campent sous les pins rabougris. C'est la première bataille offensive que livre l'armée française. Les succès acquis font naître les plus grands espoirs.

Au cours de cette période, les chefs de corps se sont rapidement succédé à la tète du 18e. Le Commandant BRION, nommé lieute­nant-colonel, quitte le Bataillon le 21 novembre pour aller prendre le commandement du 51e R.I. Le Commandant MAYER, qui lui succède, est évacué le 17 janvier 1915 et ne retournera pas au 18e.

Le Commandant ESPINOUSSE, de l'état-major de la Ve armée, prend, à la date du 3 février, le commandement du Bataillon.

Le capitaine ZEIL, qui a exercé à plusieurs reprises le comman­dement de groupements de compagnies et dont la bravoure est bien connue de tous les chasseurs, a rejoint le 13 décembre le 51e R.I., où il vient d'être nommé chef de bataillon.

Le 1er janvier 1915 a eu lieu à La Grange-au-Bois le premier « appel des morts » du 18e devant le Bataillon rassemblé pour rendre un dernier hommage à ceux qui ont donné leur vie pour la défense du pays.

ENCADREMENT DU BATAILLON AU 1er MARS 1915

État-major et  S.H.R.

 

        MM        ESPINOUSE Chef de Bataillon, Commandant

         CUNY, Officier de détails.

        BARBIN, médecin A.-M. de 1re classe

        HIBLOT, Médecin-major

 

1ere compagnie

VITAL, Capitaine

CHRETIEN, Sous-lieutenant

TATTET, Sous-lieutenant

FRAENCKEL, Sous-lieutenant

 

2e compagnie

WAHL, Lieutenant

DROT, Lieutenant

QUEYROY, Lieutenant

 

3e compagnie

GERHARDT, Capitaine

BRUNIE, Lieutenant

SABARD, Sous-lieutenant

COLIN, Sous-lieutenant

 

4e compagnie

DUPRET, Capitaine

SALVAT, Sous-lieutenant

POUILLY, Sous-lieutenant

DOREMIEUX, Sous-lieutenant

 

5e compagnie

LAMBERT, Capitaine

EVRARD, Lieutenant

DARLOT, Sous-lieutenant

LARDE, Sous-lieutenant

 

6e compagnie

de VALICOURT, Lieutenant

RENARD, Sous-lieutenant

WARREN, Sous-lieutenant

 

Peloton de mitrailleuses

PALMADE, Sous-lieutenant

LA CHAMPAGNE
(Mars 1915)

Les attaques ont commencé dès février. Le Bataillon, cantonné à Herpont le 28, se met en marche le 1er mars vers le champ de bataille. Pluie et neige. Le paysage surprend : vastes étendues, molles ondulations, çà et là quelques boqueteaux de pins bas. Où sont les bois de l'Argonne et leurs vastes replis qui peuvent abriter des divisions entières? Ici c'est le terrain nu, la lutte au soleil. Partout des bivouacs, des chevaux. Le long de l'unique route de Somme-Tourbe à Minaucourt un va-et-vient incessant de troupes, de convois que doublent à toute allure des autos de tourisme. C'est la première fois qu'une pareille activité militaire s'étale aux yeux de tous, comme en un vaste schéma destiné à matérialiser les prescriptions du Service en Campagne. Tout cela paraît ordonné, méthodique, conduit.

Le Bataillon s'approche de la zone où gronde 1e canon : abris de La Salle-abris Guérin. Le soir, à 22 heures, ordre de se porter à Mesnil-lès-Hurlus : on pousse jusqu'au Calvaire, où l'on passe la nuit, sous la pluie. Le 2, la dislocation commence à se produire deux compagnies sont envoyées au 9e Bataillon, deux autres au 120e. Un regroupement partiel a lieu, le 3 vers le bois Accent Cir­conflexe. Une attaque est imminente : c'est le 9e qui la fait sur le bois Jaune-Brûlé. Mais avec le 9e est restée la 3e compagnie. Contre-ordre pour l'attaque ; cependant, la 3e compagnie est « sor­tie »... ; elle ne va pas loin : mitrailleuses et canons dirigent leur feu sur elle ; en trois minutes la moitié de l'effectif est détruit et les plus avancés sont allés à 20 mètres de la tranchée de départ ! Le contre-ordre parvient à la compagnie lorsqu'elle est revenue à son point de départ.

L'attaque est remise. Le Bataillon s'installe dans des tranchées peu creusées, qu'il perfectionne. Il faut travailler discrètement, car la pente est vue de l'adversaire, qui ne ménage pas ses obus. Un ordre suivi d'un contre-ordre tire le Bataillon de son stationne­ment pour l'y ramener à minuit après une longue marche dans les boyaux.

Le 4, plusieurs attaques partielles sont entreprises. De nouveau le Bataillon est dispersé.

Les 2e et 4e compagnies sont mises à la disposition du Colonel commandant le 120e. La 2e compagnie attaque la Tranchée Franco-­Boche et y acquiert quelques avantages, au prix de pertes assez sérieuses. La 4e prend 200 mètres de tranchées environ vers l'Ouïe du Crocodile et reste épaule contre épaule avec l'adversaire.

La 3e compagnie, très affaiblie par ses pertes de la veille, reste en réserve. La 6e, mise à la disposition du 128e, prend une tranchée vers la cote 196, cependant que les 1re et 5e compagnies, à la dis­position du commandant ZEIL du 51e, réussissent une opération qui affermit notre position et permet la capture de la 5e compagnie du 4e Régiment de la Garde.

La journée a été dure. Le Commandant ESPINOUSE, frappé d'une balle à la tête, est tombé dès les premières heures de l'après-­midi. Le lieutenant WAUL, commandant la 2e compagnie, a été tué en menant à l'assaut son unité. Tués aussi les sous-lieutenants FRAENCKEL et TATTET de la 1re compagnie, l'adjudant-chef CHAPOTAT, l'adjudant, SIMON, l'adjudant DUPRE.

Le sous-lieutenant RENARD a eu la poitrine traversée d'un coup de feu.

La 1re compagnie a été superbe d'entrain. Le sous-lieutenant CHRETIEN, le sergent BECHER ont fait merveille ; le chasseur ANSELME s'est signalé pour sa décision et sa bravoure. Tous ont rivalisé de zèle et d'ardeur.

Trop éprouvé pour être jeté dans une nouvelle affaire, le Batail­lon organise le terrain conquis qu'il occupe jusqu'au 12 mars. Ramené ensuite dans une zone d'abris entre Sommes-Tourbe et Somme-Suippes, il y reçoit des renforts, s'y reconstitue partiellement. Le 16 mars, le Chef de Bataillon DE TORQUAT DE LA COULERIE, du 15e R.I., vient en prendre le commandement.

Après une période très courte en secteur, au nord de Mesnil-lès-­Hurlus, du 20 au 23 mars, le Bataillon est transporté en camions-­autos à Dammartin-sur-Yèvre. Le 25 mars, la Division est passée en revue par le général JOFFRE, commandant en chef. C'est la fin de la bataille de Champagne ; d'autres offensives sont en projet.

 

Ordre de la 3e Division.

Avant de s'éloigner de ces terrains de la cote 196, illustrés à jamais par l'héroïsme des 1er et 2e C.A., avant de se séparer des 87e et 4e bri­gades qui les occupent encore, le Général commandant la Division remer­cie les chefs de ces brigades, le général REMOND, le colonel LEVY, le lieutenant-colonel GIRARD, les chefs de corps, les officiers et les troupes, de l'énergie et de la vaillance dont ils n'ont cessé de faire preuve.

Fatigues, privations, bombardements, mitrailleuses, rien n'a arrêté l'élan de nos troupes. Elles ont tout bravé, tout attaqué.

Le Général de Division est fier d'avoir eu les 4e et 87e brigades sous ses ordres.

Il s'incline profondément devant leurs drapeaux, il salue avec respect et émotion tous les braves qui sont tombés glorieusement face à l'en­nemi, pour la Patrie.

Signé : Général CHRETIEN.

LA WOËVRE
(Avril-mai 1915)

Recomplété par de nouveaux renforts, le Bataillon repart le 30 mars. Il cantonne à Laheycourt, à Bulainville, à Senoncourt. Là on commence à avoir quelques renseignements sur la destina­tion définitive. Un détachement d'armée aux ordres du général GÉRARD, commandant le 2e C. A. (D. A. G.) a pour mission d'at­taquer à l'est de Verdun, en vue d'amener le repli des positions allemandes des Hauts de Meuse. C'est une tentative de « réduction de la hernie de Saint-Mihiel ».

De grandes précautions sont prises pour cacher la marche d'ap­proche. Le 3 avril, le Bataillon vient aux abris de La Beholle et du Rozellier ; il en repart en pleine nuit pour gagner Ronvaux où il s'entasse dans les maisons. Défense de circuler : toute la journée se passe ainsi. Avec les mêmes précautions, on atteint le 5 les abris de Manheulles ; le 6 au matin, on est à Pintheville qui regorge de troupes et de canons. Dans cette plaine que les observatoires ennemis commandent des crêtes, les villages sont les seuls couverts utilisables. Ils sont aussi des cibles commodes pour les artilleurs allemands. Le Bataillon reste à Pintheville les 6, 7 et 8 avril. Il y est violemment bombardé, on raison de la présence en ce point de nombreuses batteries françaises. Par un rare bonheur, il évite des pertes trop gaves. En secteur devant Pareid le 9 et le 10, il revient aux abris de Manliculles, y passe la journée du 11, est brusquement rappelé à Pintheville dans la soirée et mis par série de trois ou quatre compagnies à la disposition du Colonel com­mandant le 120e, les 12 et 13 avril, pour appuyer des attaques de ce régiment. Ces attaques ne peuvent déboucher. Le Bataillon est alors ramené à Watronville non sans avoir perdu un certain nombre des siens. Le lieutenant ÉVRARD et le sous-lieutenant POUILLY sont blessés, ce dernier très dangereusement.

La période des attaques est passée ; après stationnement à Watronville, Derame-la-Rue et Haudiomont, le Bataillon va tenir le secteur de Trésauvaux entre les Hauts de Meuse et la route de Bonzée à Fresnes. Il s'échelonne entre les premières tranchées et Bonzée où est la réserve de brigade. Le P. C. du Bataillon est à Trésauvaux, les cantonnements de repos à Manheulles et à Ronvaux. Il reste dans cette région du 20 avril au 4 juin, sans qu'il soit intéressant de mentionner autre chose que des bombar­dements, parfois sérieux, sur les villages et sur la crête de Montgir­mont, droite de la position.

Le 4 juin, le Bataillon vient au Camp Romain sur les Hauts de Meuse, au nord de la route de Metz.

C'est la fin des opérations en Woëvre.

 
 

LA TRANCHÉE DE CALONNE
(Juin 1915)

Le Bataillon est au Camp Romain du 5 au 19 juin. Il coopère à l'installation de ce camp, bien conçu et agréable à habiter.

A l'exception d'une alerte qui provoque l'envoi, pendant trois jours, de quelques unités au camp de Fontaine-Saint-Robert, il est au repos complet et peut même faire un peu d'instruction.

L'ennemi ayant gagné du terrain au cours d'une attaque par surprise, à la Tranchée de Calonne, une contre-offensive est déci­dée. Le Général CHRÉTIEN, commandant la 3e Division, en a la direction. L'exécution en est confiée aux 147e R. I., 9e et 18e Batail­lons de Chasseurs.

Le 20 juin, le 147e s'empare de deux lignes de tranchées. Der­rière lui, le 18e à droite, le 9e à gauche, élargissent la brèche qu'il vient de faire. Quatre compagnies du 18e (1re, 2e, 3e, 4e) cherchent à s'emparer de la région dénommée « Point A », vers la  route même du Rozellier à Vigneulles, cependant que les 5e et 6e aident le 9e à progresser vers le « Point C ». La journée du 21 se passe en une série d'attaques partielles, au cours desquelles nous gagnons un peu de terrain. Le 22 au petit jour, les Allemands lancent une vigoureuse contre-attaque sur les positions que nous leur avons enlevées, s'aidant de liquides enflammés et de grenades suffocantes. Ils réussissent à prendre pied dans une tranchée dont la plus grande partie des défenseurs succombent en combattant. A la fin de la matinée, ils restent maîtres de cet élément où ont été tués les sous-lieutenants SOUCHOY et REGGIANI, et où le capitaine DUPRET, blessé, est tombé, aux mains de l'ennemi. Les Allemands sont moins heureux dans la tranchée occupée par la 1re compagnie. Reçus à coups de fusil et de grenades, ils parviennent cependant d'abord à progresser, mais lentement, grâce au magnifique dévoue­ment du sergent MATHIEU et du caporal OGEZ qui ont déclaré que « la compagnie n'ayant jamais reculé, elle ne reculerait pas ». Et cependant elle doit reculer, parce que les grenades sont épuisées et que le ravitaillement se fait avec difficulté. Bientôt il ne restera plus rien de la tranchée de la 1re. Enfin les munitions affluent. C'est maintenant nous qui attaquons et c'est au tour de l'ennemi d'essayer de s'accrocher aux barrages où nous l'avions précédem­ment arrêté. Peine perdue : il faut décamper. Et à 7h15, après cinq heures d'un combat sans arrêt, la 1re compagnie plante son fanion à l'extrémité de la tranchée où l'ennemi a, le matin, fait son apparition.

Les 23 et 24 se passent sans incident ; nous consolidons notre position que le 18e remet le 24 au soir au 87e R. I.

Malgré des pertes sérieuses, le Bataillon conserve son magnifique esprit offensif. Rappelé en ligne deux jours plus tard, il n'a toute­fois pas à agir et est envoyé au Camp Romain où il stationnera jusqu'au 5 juillet.

C'est là que lui parvient l'ordre suivant du Général commandant la 3e Division :

Merci à tous les braves qui ont combattu sous mes ordres dans le bois Haut, dans les belles journées du 20 au 26 juin : 147e Régiment d'Infanterie, 9e et 18e Bataillons de Chasseurs, 87e et 128e Régiments d'Infanterie, 17e Régiment d'Artillerie, 3e Génie, tous ont rivalisé de vaillance.

De l'aveu de l'ennemi, lui-même, nos attaques des 20 et 21 juin furent foudroyantes.

Honneur aux 147e Régiment d'Infanterie, 9e et 18e Bataillons de Chas­seurs qui les ont exécutées dans un superbe élan. Deux lignes allemandes, 200 prisonniers, du matériel sont tombés entre nos mains et un régiment prussien a été anéanti.

Après des luttes opiniâtres, soutenues sans trêve jour et nuit, nous restons maîtres de la position allemande sur un front de près de 700 mètres.

Honneur au 128e qui a poursuivi l'effort des chasseurs et nous a assuré la possession d'un bastion avancé. Honneur au 87e qui, dans une mêlée terrible soutenue sur les parapets des tranchées conquises, a rejeté l'adversaire qui, à la faveur de nuages de fumée et liquides incendiaires, s'était élancé pour reconquérir ses anciennes positions.

Braves soldats, vous avez tous vu cette grande figure énergique et sereine qui précédait vos lignes d'assaut dans le bois Haut.

C'était la France.

Vous avez bien mérité d'elle. Gloire immortelle à ceux qui sont tombés. Officiers et soldats, j'ai été fier de vous commander.

Au P. C., le 1er juillet 1915.

    Signé : Général CHRÉTIEN.

 

LES ÉPARGES
(5 juillet-23 septembre 1915)

Pendant l'occupation du secteur de Woëvre, le Bataillon a appris à connaître la crête grise, sorte de falaise qui domine les villages des Éparges et de Combres. De leurs tranchées, les chas­seurs ont pu voir cette crête bombardée quotidiennement, secouée par d'incessants combats locaux, derniers soubresauts des atta­ques faites en ce point quelques semaines auparavant. C'est là qu'ils sont envoyés dès le 5 juillet, pour y tenir le secteur, l'orga­niser et s'efforcer de conquérir le sommet de la crête, le fameux « Point X » dont les communiqués ont révélé l'identité, et d'où un guetteur, dominant la plaine de Woëvre, empêche tout mouvement de jour à l'intérieur de nos lignes.

Ce secteur se ressent de l'activité guerrière qui vient de s'y manifester et qui est loin d'être apaisée. A la suite des attaques de mars et d'avril, nous avons conquis la presque totalité de la crête, sauf le point culminant, où l'ennemi accroché, en assez pénible posture, ne réussit à se maintenir que grâce à une attitude agressive ne laissant aucun répit. Les lignes sont au contact, pour éviter la bombe et l'obus, mais c'est alors la grenade qui intervient, et l'on passe là des journées entières guettant l'engin qui va s'abattre en tournoyant dans la tranchée : pétards à manches, « tuyaux de poêle », ou même torpilles de 240, qui balaient de leur souille hommes, pierres, sacs à terre. La fatigue est extrême du fait de la tension nerveuse, mais pas un instant ne faiblit la volonté de tenir malgré tout. On riposte avec toute la gamme des gre­nades dont on est abondamment pourvu, avec les « celleriers », ces minuscules canons faits eux-mêmes d'un corps d'obus, avec les mortiers Aasen, avec le canon de 58. Pour aller chercher le Boche, accroché aux pentes devant Combres, l'artilleur diminue ses charges ; pour limiter la débauche de munitions à laquelle se livre l'adversaire, on lui applique le régime des tirs de représailles. Et l'on a la satisfaction d'apprendre que tous les jours ne sont pas roses pour « Fritz » qui, dans une composition en vers tombée entre nos mains, chante les tourments de l' « Enfer de Combres ».

Pour hâter l'évacuation du Point X, un certain nombre de gale­ries de mine ont été creusées. Nous devançons l'ennemi dans ce travail. Le 12 juillet, trois fourneaux sont prêts à exploser : deux sont sous la tranchée allemande elle-même. Une attaque combinée avec l'explosion doit nous donner la possession de la crête. A 10 heures, en effet, les trois mines sautent et nos vagues d'assaut se précipitent, mais la chute des pierres projetées par l'explosion tue ou blesse plusieurs chasseurs et disloque un peu l'attaque. Cependant, les bords des entonnoirs sont occupés par deux com­pagnies (4e du 18e et 3e du 9e) qui prennent pied en divers points de la tranchée allemande. Mais l'adversaire sort en masse des abris creusés dans les pentes sud de la position ; l'artillerie allemande, non contrebattue, agit à vues directes sur nos éléments d'attaque qui, après une lutte de plusieurs heures et après avoir perdu tous leurs officiers, doivent revenir à la tranchée de départ. L'attaque, reprise au petit jour avec d'autres compagnies venues de l'arrière, ne donne pas un résultat meilleur. La journée a coûté de grosses pertes au Bataillon, qui n'en défile pas moins brillamment, drapé de boue et d'orgueil, dans les rues de Verdun où ses clairons reten­tissent le jour de la Fête Nationale.

Par période de sept jours, alternant la tenue du secteur avec des repos à Glorieux, au Camp Romain, à Fontaine-Saint-Robert ou au camp des Trois-Jurés, travaillant même à la Tranchée de Ca-lonne dans le secteur plus calme de la brigade voisine, le 18e passe ainsi les mois de l'été 1915.

 

Le 23 septembre, il est définitivement retiré de la région, vient un jour au secteur du bois Bouchot, puis, embarqué en camions­-autos, il débarque à Verrières, au sud de l'Argonne, le 1er octobre. Depuis le 25 ont commencé les attaques de Champagne. On parle d'une grande victoire, on pense percer et couper en deux les armées ennemies. Et le désir d'être de la fête laisse dans l'oubli les fatigues de l'âpre secteur dans lequel, au cours de ces deux mois et demi d'occupation, tant des nôtres sont tombés.

 

 

LA DEUXIÈME BATAILLE DE CHAMPAGNE
(Octobre-novembre 1915)

Nouvel embarquement le 4 octobre. Déposé près de Somme­Suippes, le Bataillon vient coucher sous les petits sapins qui lui sont déjà familiers. A Cabane-et-Puits, il reste quatre jours avec l'espoir d'être appelé à la rescousse. Pendant son contact avec l'arrière du champ de bataille, il peut se rendre compte que des progrès ont été réalisés dans la préparation d'une attaque. L'ar­tillerie lourde est en plus grande quantité, et une batterie de pièces de marine dont les longs cols émergent d'un train blindé voisin du bivouac, absorbe la curiosité de tous. Le 8, on se rap­proche ; la Division entière doit relever en ligne une division du 11e C. A., mais au jour, le mouvement n'est pas terminé. En belle ordonnance, le Bataillon gagne ses emplacements à travers champs, s'avançant sous une vive canonnade au cours de laquelle le sous­-lieutenant JACQUET est mortellement frappé. Le soir, on est au bois des Taupes où pendant douze jours le Bataillon subit d'in­cessants bombardements qui lui coûtent au début d'assez grosses pertes, mais dont l'efficacité ira en se ralentissant avec la création d'abris profonds. Là encore, la capacité de travail du Bataillon lui permet d'éviter une destruction certaine ; quelques jours plus tard, en secteur, elle lui permettra l'arrêt de l'adversaire.

Le 20, quatre compagnies aux ordres du capitaine VITAL vien­nent occuper le secteur du Gril ; les deux dernières sont en réserve au bois des Éperviers. L'ennemi se retranche dans les bois du Trident, de la Galoche et sur toutes les pentes nord du ravin de la Goutte. Notre offensive paraît s'être arrêtée. De part et d'autre on organise des positions.

Le 30 octobre, à 15 heures, après un bombardement de plusieurs heures, l'ennemi attaque notre front. Grâce aux abris créés depuis dix jours, le Bataillon, peu éprouvé par cette canonnade, est prêt à recevoir l'adversaire. Dès que celui-ci a mis le pied hors de ses tranchées, fusils et mitrailleuses l'accueillent. Clouée au sol par ce tir inattendu, la première vague doit attendre la nuit pour regagner sa tranchée de départ.

Le 31, une nouvelle tentative est faite dans des conditions identiques comme préparation. Elle a encore moins de succès. Notre artillerie exécute à notre demande des tirs sur la tranchée de départ elle-même, d'où l'ennemi ne peut cette fois déboucher et qui a été criblée de balles dès que les tuniques grises ont fait leur apparition.

 

La belle attitude du Bataillon est attestée par les félicitations suivantes du Général commandant la 4e division :

Le 30 octobre, après un bombardement d'une violence inouïe, l'en­nemi attaquait en force le secteur que les 9e et 18e Bataillons de Chas­seurs avaient la mission de défendre. Sans s'inquiéter de la poussée qui permettait aux Allemands de prendre momentanément pied dans une partie du front à leur gauche, les chasseurs reçurent l'ennemi à coups de grenades et, lui infligeant des portes énormes, le rejetèrent en désordre sur ses lignes.

Le lendemain, nouvelles tentatives d'attaque pareillement enrayées.

Au cours de ces deux journées, les chasseurs de la 4e Division se sont montrés, comme toujours, superbes d'endurance et d'entrain : pas un Allemand ne réussit à prendre pied dans une partie quelconque des tranchées tenues par les 9e et 18e Bataillons.

Le Général du division est fier de ses vaillants Chasseurs et leur adresse ses cordiales félicitations.

     Signé : Général LEBRUN.

 

L'ennemi se calme après ces deux tentatives. Jusqu'au 10 no­vembre, on peut travailler, sans être trop gêné, à l'amélioration du secteur. Puis le Bataillon passe en réserve. Le 15 novembre, il est embarqué a Somme-Tourbe et gagne Pierrefitte où un repos complet lui est accordé. Il passe le mois de décembre et le début de janvier 1916 à Erize-la-Grande, se préparant par des exercices quotidiens à l’attaque de positions. On parle d'une grande offen­sive pour le printemps. Nous apprendrons plus tard que ce sont les Allemands qui l'entreprendront.

LE BOIS DES CHEVALIERS
(15 janvier - avril 1916)

Au mois de janvier, le Bataillon se remet en marche en direction de Verdun. Pendant trois mois, il va tenir le secteur du bois des Chevaliers.

Des travaux récents, en attirant l'attention de l'ennemi, en ont fait un secteur bombardé ; la partie centrale est soumise à la guerre de mines. Cependant cette région n'a jusque-là que peu souffert. Les grands arbres intacts offrent une protection aux vues et une réserve de bois pour les sapes profondes. Celles-ci deviendront bientôt nécessaires pour s'abriter des bombardements quotidiens.

Dès le 10 février, en effet, l'ennemi devient nerveux. Des ren­seignements ont fait connaître qu'une grande offensive allemande va être dirigée contre Verdun, mais le secteur d'attaque est encore incertain. Le ravin de Seuzey est propre à masquer un rassemble­ment de forces, et la position française, peu profonde, avec la Meuse débordée à dos, se trouverait en cas d'attaque puissante dans une situation précaire. Quelques jours se passent dans l'anxiété. Les trains régimentaires ont repassé la Meuse ; les troupes restent seulement avec leurs moyens de combat.

Le 21, le secteur est vivement canonné, mais ce tir ne fait illusion à personne. Déjà on sait que le front nord de Verdun est l'objet d'un « pilonnage » continu. C'est là que l'armée du Kronprinz por­tera son effort ; devant nous ce n'est qu'une diversion. La situation deviendrait cependant des plus inquiétantes si l'ennemi mettait la main sur la ville. On est prêt à tout. Les nouvelles qui parvien­nent les jours suivants sont rassurantes. Mais l'adversaire continue néanmoins à jeter sur le secteur des Chevaliers ses bombes, ses énormes torpilles et ses obus de 210. On sent qu'il est prêt à passer à l'attaque dès que des avantages sérieux seront obtenus sur 1e front nord. Son espoir décroît peu à peu et à mesure décroît aussi la violence de ses bombardements. Les nouvelles sont de plus en plus réconfortantes. Le Général PÉTAIN - qui commandait en Champagne en octobre dernier - vient de prendre le commande­ment de l'armée de Verdun et en une file, ininterrompue, les camions « montent » vers la bataille, le long de la Voie Sacrée.

Le mois de mars se passe sans autres incidents que la lutte d'artillerie quotidienne. L'alternance avec le 9e se produit tous les douze jours. A l'exception de deux compagnies restant en secteur, les Bataillons vont au repos à Troyen, qui n'est que peu bombardé malgré sa proximité des positions adverses. En ligne, la lutte est toujours active autour des entonnoirs de mines. Les travaux d'entretien et d'amélioration du secteur absorbent à peu près toute l'activité.

On sait que dans le secteur nord de Verdun la lutte est dure, mais l'ennemi parait arrêté sur ce front. Il tente le débordement par la rive gauche de la Meuse, et après les noms célèbres des Caures, de Douaumont, de Vaux, on parle maintenant de 304, du Mort-Homme, des bois Bourrus. Les chasseurs ont un hoche­ment de tête : « On ira bien par là quelque jour. »

Du S au 10 avril, le 166e R. I. relève en secteur les Bataillons de Chasseurs. Une courte marche doit les ramener dans la région de Pierrefitte où ils seront mis au repos.

ENCADREMENT DU BATAILLON AU 1er AVRIL 1916

État-major et  S.H.R.

 MM de TORQUET de la COULERIE, Chef de Bataillon, Commandant

  VITAL, capitaine adjudant major

  DESTAILLEUR, officier adjoint au chef de corps

  BABOU, officier de détail

  MOUNIER, officier d’approvisionnement

                BARBIN, médecin-major

  MONLUGUET, médecin aide-major

                Le P. DECISIER, aumônier

 

1ere compagnie

DE GENTIL-BAICHIS, Capitaine

BRUNIS, Lieutenant

DE MADIERES, Sous-lieutenant

PLAS, Sous-lieutenant

 

2e compagnie

EVRARD, Capitaine

DE BUTLER, Sous-lieutenant

HENRIOT, Sous-lieutenant

DENIS, Sous-lieutenant

 

3e compagnie

SADON, Lieutenant

DRACACCI, Sous-lieutenant

COLIN, Sous-lieutenant

RICHET, Sous-lieutenant

 

4e compagnie

BONNEF, Capitaine

QUEROY, Sous-lieutenant

MENIELLE, Sous-lieutenant

5e compagnie

ROUMIGUIERES, Capitaine

LARDE, Sous-lieutenant

CHEVALLIER, Sous-lieutenant

PANZANI, Sous-lieutenant

6e compagnie

RENARD, Lieutenant

LE ROY, Sous-lieutenant

RICHARD, Sous-lieutenant

Peloton de mitrailleuses

PALMADE, Lieutenant

DHERVILLE, Sous-Lieutenant

CRONIER, Sous-lieutenant

DOUAUMONT
(Avril 1916)

A Taillombois, le 10 avril, un nouvel ordre oriente le Bataillon vers le nord. Il est à Senoncourt le 11, au Faubourg-Pavé le 12. Dans la nuit du 13 au 14, il vient dans le secteur du fort de Douau­mont, la première tranchée à 150 mètres du fort, que tient l'ennemi.

Le contraste de cette région avec celle que vient de quitter le Bataillon est saisissant. Depuis près de deux mois, d'incessants bombardements ont créé un terrain dévasté, chaotique, véritable champ d'entonnoirs d'où toute végétation a disparu. Les bois de la Caillette, à droite, réduits à une série de troncs squelettiques, laissent apercevoir un réseau de tranchées où se livrent de per­pétuels combats. Le relief disparaît dans ce paysage tourmenté. Le fort de Douaumont et le fort de Souville aux profils déchiquetés se regardent comme deux adversaires. Entre eux, le village de Fleury-devant-Douaumont dresse dans le fond ses pans de mur sur lesquels pleuvent des obus de tout calibre. La moindre agita­tion déclenche un barrage dans l'exécution duquel l'ennemi jette à profusion les 150 et même les 210.

Le front à défendre est peu net, mordu en certains endroits par des enclaves ennemies qui résultent des combats antérieurs. Peu d'abris : seules les constructions bétonnées du temps de paix donnent une protection sûre contre les bombardements. L'ennemi emploie contre eux le 305 et même le 380.

Le temps est affreux, les boyaux pleins d'eau. Chaque soir, les corvées de soupe, par petits groupes de quatre chasseurs, filtrent entre les barrages, évitant à la lueur des éclatements les entonnoirs boueux dans lesquels un homme serait englouti. Trébuchant et glissant, les « hommes soupe » mettent une nuit entière pour aller jusqu'à la Fourche - quelquefois même jusqu'au Faubourg­-Pavé - chercher et rapporter à leur camarades la viande, le pain, le chocolat et les conserves de toute nature que ceux du ravitail­lement attachent à leur corps ou glissent dans leurs poches, en évitant toutefois de trop les surcharger, tant les difficultés du parcours sont considérables.

L'énergie déployée par ces volontaires est énorme : ils rentrent harassés de fatigue au jour, faisant quelquefois les derniers cent mètres sous les balles des mitrailleuses ennemies. Épuisés par une tension nerveuse extrême, ils déclarent qu'ils préfèrent se laisser mourir de faim, plutôt que de retourner chercher les vivres à l'arrière ; et le soir, poussés par le sentiment du devoir et l'esprit de camaraderie, ils s'en vont, marmites au dos, vers les lisières des bois, que l'ennemi arrose souvent de ses rafales et recommen­cent leur voyage mouvementé à travers le champ d'entonnoirs.

Pendant les premiers jours, l'ennemi agit peu par son canon sur le secteur. Une attaque partielle destinée à redresser notre ligne en nous emparant du saillant de la « Maison des mitrailleuses » est décidée pour le 21. L'ennemi ne nous laisse pas le temps de la monter. Dès le 19, il bombarde le secteur du Bataillon par un tir de torpilles qui dure de midi à 20 heures. Le 20 avril, il recom­mence, augmente l'intensité du tir qu'il allonge brusquement à 18h15 en même temps que son infanterie se porte à l'attaque de nos lignes. Deux régiments y participent. L'effort principal se porte sur la 4e compagnie qui, soumise pendant tout l'après-midi au bombardement, n'ayant que des abris précaires, a déjà perdu une notable partie de son effectif. Les survivants, submergés, ne peuvent résister longtemps à la poussée violente de l'adversaire ; à leur tête, le capitaine BONNEF est tué, l'adjudant-chef DASSON­VILLE blessé. L'ennemi pénètre dans la tranchée. La droite de la 5e compagnie, violemment attaquée, subit aussi de grosses pertes. Le sous-lieutenant LARDE et l'adjudant-chef MINET tombent mor­tellement frappés. Le sous-lieutenant PANZANI, une canne à la main, bondit sur le parapet : « A moi, les vrais chasseurs! » Il est blessé, mais l'avance est limitée en ce point. Du reste, à notre gauche, les vagues allemandes sont venues buter sur les réseaux du fort. Contenues de front par la section du sous-lieutenant CHEVALLIER, prises d'enfilade par une section de mitrailleuses du 9e, elles sont clouées au sol : seuls quelques isolés essaient encore de progresser. La résistance se cristallise autour de l'abri pour infan­terie qui sert de réduit à la compagnie de gauche. C'est un combat ardent qui se livre dans ce coin, à la grenade, au fusil, à la mitrail­leuse. Le chasseur PERREAU, cuisinier des officiers, a bondi en bras de chemise dès le début de l'action ; il ne tarde pas à revenir blessé. A son capitaine qui s'informe : « Ça ne fait rien, j'ai fait un joli carton. » Des barrages sont établis sur les tranchées et boyaux ; l'adversaire épuisé n'essaie du reste pas de les forcer.

A la droite, la 3e compagnie, assaillie par de l'infanterie précé­dée de lance-flammes, a dû abandonner momentanément un élément de tranchée, malgré les efforts de l'héroïque sous-lieute­nant RICHE, qui est mortellement frappé. Enveloppés dans la carrière qui sert d'abri à la section de réserve de la compagnie, les chasseurs se dégagent, avec peine. Le lieutenant SAVON, com­mandant la compagnie, est tué. Plusieurs gradés et chasseurs tombent autour de lui. Mais la tranchée est reprise et l'ennemi ne fait plus aucun effort de ce côté. Il a du reste été fort mal reçu par la section de l'adjudant OSZWALD au barrage du boyau et par la section du sous-lieutenant COLIN qui est à la gauche de la compagnie. Monté sur le parapet pour mieux diriger le feu de sa troupe, le jeune et ardent officier tombe atteint d'une balle.

L'attaque ennemie est bloquée à 19 heures. Des renforts qui viennent d'arriver permettent la contre-attaque au petit jour. Celle-ci consiste en une poussée en équerre menée d'une part, par la 1re compagnie, d'autre part, par les 4e et 5e. Elle réussit pleine­ment. En quelques minutes, les Allemands sont rejetés hors de la tranchée, laissant entre nos mains 5 prisonniers, 3 mitrailleuses, 70 à 80 fusils. De nombreux corps jonchent le sol.

L'attaque a été si rapidement conduite que la résistance a été à peu près nulle et que nos pertes sont très faibles. Seul le chasseur François LEFÉVRE, grenadier d'élite, emporté par son ardeur à poursuivre l'ennemi, est frappé mortellement au moment même où le succès est complet.

Aucune nouvelle tentative n'est faite pour nous arracher la tranchée que nous venons de reprendre. Les derniers jours de l'occupation sont plus calmes que ceux du début. Cependant l'ar­tillerie ennemie est toujours active.

Le 25, le Bataillon est relevé par le 174°. Embarqué en camions, il est transporté à Hévillers où il arrive le 27 avril et séjourne jusqu'au 1er mai.

ÉTÉ 1916

Le Bataillon est transporté en chemin de fer, le 2 mai, d'Hévil­lers dans la région au sud de Beauvais (Berneuil, Auteuil, Vaux) où il séjourne jusqu'au 11.

Il gagne ensuite par étapes la région de Longueil-Sainte-Marie et cantonne à Chevrières du 14 au 22 mai. Désigné à ce moment pour constituer la garde d'honneur du G. Q. G., à Chantilly, il stationne dans les villages environnants (Vineuil, Avilly, Gou­vieux).

Passé en revue par le Général commandant en Chef sur la pelouse de Chantilly le 6 juin, il repart le 10 pour entrer en secteur au bois des Loges (région de Lassigny) du 14 au 28 juin. Le 29, il se met en marche vers le champ de bataille de la Somme.

 

LA SOMME
(Juillet - décembre 1916)

La Bataille a commencé le 1er juillet. Ce jour-là, le Bataillon arrive à Conty. Il est dans la situation de réserve de groupe d'armées et séjourne en ce point jusqu'au 12 juillet. A ce moment le 2e C. A. est mis à la disposition de la VIe Armée et acheminé lentement vers le champ de bataille.

Le 13, le Bataillon est à Gentelles, d'où il repart le 17 pour s'ins­taller au camp 61 près du Hamel ; il y demeurera jusqu'au 22.

L'activité de toute cette région rappelle celle de Champagne. Le pays, assez découvert, mais plus accidenté que la plaine cham­penoise, permet d'embrasser de vastes horizons où les bivouacs, les parcs, les dépôts de toute nature s'accrochent aux falaises, se dissimulent dans les boqueteaux, souvent même s'étalent en pleins champs. De nombreux camps d'aviation se montrent sur les crêtes. L'immunité de pareils groupements réside surtout dans leur dispersion. Un réseau serré de voies de communication facili­tant la circulation automobile, a permis un échelonnement plus profond des troupes et du matériel. C'est un paysage extrêmement curieux dans lequel les ressources de la guerre moderne s'étalent aux yeux de la troupe qui passe. Des canons à longs cols, braqués haut, en plein air ou portés par des trains blindés, sont en nombre respectable. D'énormes dépôts et de nombreuses voies ferrées annoncent des préparatifs méticuleusement faits.

Et l'on sait aussi que la bataille est méthodiquement conduite, que la préparation d'artillerie sera puissante et que l'infanterie aura surtout pour rôle d'occuper le terrain purgé d'ennemis par le canon et de le défendre contre les réactions possibles. Le Général FOCH a lui-même expliqué la méthode aux officiers du Bataillon, sur la route,        l'entrée d'Oresmaux, le 12 juillet.

Les curieux ont du reste tout le loisir d'examiner de près les ressources mises en oeuvre. Le Bataillon du camp 61 gagne, le 23 juillet, le camp 58 ; le 30 juillet, il est au camp 51 près de Chui­gnolles, où il reste jusqu'au 9 août. A ce moment le 2e C. A. fait partie de la Xe armée, et le Bataillon vient à  Proyart où il ne fait que passer pour entrer en secteur le 11 au soir dans la région du Chancelier.

Des attaques récentes ont fait naître, dans ce secteur, une acti­vité assez grande. La route nationale d'Estrées à Villers-Carbonnel sépare les adversaires et sort de terrain de combat, pour les pa­trouilles qui s'y rencontrent la nuit. C'est au cours d'une de ces rencontres que le sous-lieutenant HENRIOT est tué, le 15 août. Mais l'infanterie ennemie n'attaque pas : elle se contente de parer nos coups et de se couvrir par une puissante artillerie. Tous les jours, la tranchée du Chancelier, le chemin creux, le boyau de Friedland et tous les bois Bulow ont leur copieuse ration de 105, de 150 et même de 210. Nous avançons cependant notre ligne, en vue d'attaques prochaines et, le 17 soir, le secteur est rendu aux chasseurs de la 121e D. I.

De Proyart, le Bataillon gagne Ignaucourt où il stationnera du 12 août au 2 septembre, puis revient à Chuignes et Fontaine-lès-­Cappy. L'attaque sur Berny-en-Santerre doit être entreprise par la Division. C'est le 6 que la 7e Brigade se porte en avant. Elle conquiert quelques tranchées, mais ne peut réussir à garder Berny tombé un instant entre ses mains. La ligne s'installe aux abords ouest du village et c'est là que le Bataillon vient passer les journées des 8 et 9 septembre. Cependant, à l'est de Berny l'attaque conti­nue. Après le 328e, très éprouvé, le 120e tente un effort pour constituer une position enveloppant le village. C'est aux deux Bataillons de Chasseurs que reviendra l'honneur de réussir cette importante opération.

Ramenés en arrière du 10 au 13 (bois Triangulaire), les Bataillons sont engagés le 13 soir dans la région des tranchées des Hures et du Typ. L'enlèvement de Berny se fera en deux phases. Le 15, une brillante attaque, conduite parle lieutenant CHRÉTIEN et la 1re com­pagnie nous donne, avec la possession du chemin creux au nord du village, une tranchée de départ d'où s'élancent, le 17, les vagues d'assaut des 1re et 2e compagnies. Elles attaquent rapidement le bois Guibert, cependant que le 9e B. C. P. prend pied dans Berny. L'ennemi contre-attaque à notre gauche et chasse les sections du régiment voisin du terrain qu'elles viennent de conquérir. Son mouvement est enrayé par la résistance des sections THELIER et SERRURE qui brise l'effort des grenadiers allemands. Grâce à cette protection sur son flanc gauche, le 9e B. C. P. peut s'installer dans Berny qui reste définitivement entre nos mains. Le 18e tient le bois Guibert. Cette fois, l'ennemi, qui a éprouvé de grosses pertes tant par le fait d'une préparation puissante que par la violence de l'attaque, ne réagit plus et la journée du 18 se passe dans le plus grand calme.

Le secteur est alors remis à une division voisine, et le Bataillon transporté en camions-autos stationne jusqu'au 13 octobre d'abord à Esclainvillers, puis à La Faloise.

 

Les brillants résultats acquis au cours des opérations des 15 et 17 septembre valent au Bataillon une proposition de citation à l'ordre de l'Armée. Il reçoit en même temps les félicitations de ses chefs reproduites ci-après :

Je veux espérer que, partant de plus haut, des témoignages de satis­faction viendront constater la brillante allure des corps de la 87e brigade dans les actions des 15 et 17 septembre, mais je tiens à dire immédiate­ment à tous mes félicitations que déjà, au cours du combat, j'ai envoyées par téléphone.

Le 15 septembre, les 9e et 18e B. C. P. ont enlevé la position compli­quée des tranchées de Berny et du Typ qui nous assurait pour la suite une bonne base de départ. De grosses difficultés ont été vaincues dans cette opération et les pertes infligées à l'ennemi ont été considérables. Le 17 septembre, en superbe ordonnance, la ligne d'attaque des 9e et 18e B. C. P., du 120e R. I., s'est portée à l'assaut de Berny ; les puissantes organisations du Talus Organisé, du Chemin-Creux, du château de Berny ont été enlevées. Nous y avons trouvé une résistance opiniâtre de l'ennemi qui sortait de ses abris profonds et intacts, des combats locaux violents ont mis en lumière la valeur offensive des braves de la 87e brigade qui, par la baïonnette et les grenades, ont anéanti toutes les résistances. Les cadavres allemands sur ce point peuvent se dénom­brer à un minimum de 400 du fait de nos armes, sans compter les pertes infligées par l'artillerie.

L'offensive a été poussée victorieusement jusqu'aux objectifs assi­gnés, sauf sur la tranchée du Parc où les nids de mitrailleuses n'avaient pu être réduits par le canon.

Ces résultats ont été obtenus avec des pertes heureusement très moyennes.

Honneur à tous, chefs d'attaque de tous grades et soldats, portez haut la tête vous en avez le droit.

Je salue les braves qui sont encore là et je m'incline avec respect devant ceux qui ont donné leur sang et leur vie.

                                Signé : Général REMOND,
                                Commandant la 87
e brigade.

 

 

Le Général commandant la 4e Division a reçu hier, tout particuliè­rement pour la Division, les vifs et personnels témoignages de satisfac­tion du Général commandant le corps d'armée, du Général commandant l'armée et du Général commandant en chef.

Il est heureux de les transmettre aux vaillantes troupes auxquelles ils sont destinés, au moment où elles commencent à prendre leur repos. Il veut y joindre, et sans attendre davantage, l'expression de toute la fierté qu'il éprouve à les commander.

                        Signé : Général LINDER
                        Commandant de  la 4
e division d'infanterie.

 

 

Le 1re compagnie, qui a mené brillamment les deux attaques, est citée à l'ordre du Bataillon :

A toujours fait preuve en toutes circonstances d’une superbe tenue au feu. Pendant cinq jours, dans un secteur constamment bombardé, avec un entrain et un allant remarquables, un esprit offensif nettement caractérisé, a exécuté, les 15 et 17 septembre 1916, deux attaques consé­cutives enlevant trois lignes de tranchées sur une profondeur de près d'un kilomètre.

     Signé : de TORQUAT

 

Rapproché des lignes le 18e est à Proyart du 14 au 18 octobre, dans la région de Chaignes du 18 au 23. C'est à ce, mement, que le Commandant de TORQUAT, nommé lieutenant-colonel, le quitte pour aller prendre le commandement du 166e R. I. 1. Il est remplacé par le Capitaine VITAL, nommé chef de bataillon.

Et le Bataillons revient sur son ancien secteur, prolongé cette fois par les attaques  qui ont eu lieu dans la quinzaine précédente. Nous tenons maintenant, Genermont, mais des hauteurs de Fresnes, de Mazancourt, sur lesquelles mordent nos petits postes, l'ennemi règle sur nos lignes un tir précis et meurtrier. La pluie paralyse les travaux d’amélioration ; la boue et l'eau emplissent les boyaux et rendent la vie en secteur extrêmement pénible. L'ennemi ne tente d'ailleurs aucune entreprise mais multiplie ses réglages et détruit chaque jour ce que nous essayons de reconstruire. Le 2 novembre, le 18e quitte ce secteur pour rentrer à Proyart où il passe cinq jours. Il revient alors à La Faloise où il est mis au repos.

Une nouvelle attaque visant l'enlèvement des hauteurs de Fresnes-Mazancourt doit être entreprise par la 4e D. I. Ce projet dont l'étude a été poussée jusque dans ses moindres détail doit être mis à exécution dès que le temps permettra l'établissement d'une solide base de départ. Dès le 25 novembre, le Bataillon vient à Marcelcave, où se trouve l'état-major du C.A. Un mois se passe, au milieu des pluies, sans que paraisse jamais le soleil, présage de la victoire.

C'est la fin de la bataille de la Somme.

La nuit de Noël, le Bataillon embarqué en chemin de fer prend la direction de l'est et, le 27, il débarque à Barisey-la-Côte, au sud de Toul, où il est mis au repos.


 

PÉRIODE D'ATTENTE EN LORRAINE
(Janvier-mars 1917)

Le mois de janvier se passe à Germiny, à Thuilley-aux-Groseilles, à Ochey, dans cette hospitalière Lorraine où, sous des dehors rudes, se cachent les plus belles qualités du coeur. La réception faite au Bataillon reste encore gravée dans l'esprit de tous. Le froid est venu. L'hiver est dur et les pentes du mont d'Anon, habillées de blanc, font ressortir encore plus violemment le bouquet d'arbres noirs qui couronne sa cime. Malgré l'accueil sympathique, il faut se séparer. Le 27 janvier, par un vent glacial, le Bataillon gagne en quatre étapes la région à l'est de Lunéville, où il va entreprendre des travaux de deuxième position.

Cantonné à Thiébauménil, à Manonviller, à Laneuville-aux-Bois, à Montigny, il a des chantiers sur 30 kilomètres de front. Des exercices de cadres ont lieu entre temps. On y apprend que le 18e fait toujours partie de la Xe Armée, et que c’est l’armée d'exploitation des attaques futures. Quand auront lieu ces attaques ? Au printemps sans doute. Et malgré la dureté du climats et l'austérité du paysage, on goûte avec une certaine volupté le plaisir de vivre avant d'être jeté dans une nouvelle aventure.

Le 10 mars, nouveau départ. Les travaux sont finis. La période de réentrainement commence. C'est au camp du Bois-l'Évéque que le Bataillon vient s'établir le 13 mars après quatre étapes qui lui ont fait parcourir le pays entre Meurthe et Moselle. Il y stationne jusqu'au 29 mars, est enlevé en chemin de fer à Maron et débarque à Œuilly.

 

ENCADREMENT DU BATAILLON AU 16 AVRIL 1917

État-major et  S.H.R.

 

 MM VITAL, Chef de Bataillon, Commandant

  ROUMIGUIERES, capitaine adjudant major

  CHEVALLIER, Sous-lieutenant adjoint

  QUEYROY, lieutenant, commandant le peloton de pionniers

  BABOU, officier de détail

  MOUNIER, officier d’approvisionnement

  PERE, médecin-major

  SASPORTES, médecin aide-major

  Le Père. DECISIER, aumônier

 

1ere compagnie

CHRETIEN, Capitaine

POUILLY, Lieutenant

THELIER, Sous-lieutenant

DE PERINI, Sous-lieutenant

DORIZON, Sous-lieutenant

 

 

2e compagnie

EVRARD, Capitaine

DE BUTLER, Sous-lieutenant

FERIO, Sous-lieutenant

MASSON, Sous-lieutenant

 

3e compagnie

SAUBADE, Capitaine

DROT, Lieutenant

VOSGIEN, Sous-lieutenant

CRONIER, Sous-lieutenant

MAITRE, Sous-lieutenant

 

4e compagnie

DE BELINAY, Capitaine

BAILLY, Sous-lieutenant

DENIS, Sous-lieutenant

PANZANI, Sous-lieutenant

 

5e compagnie

RENARD, Capitaine

RICHARD, Lieutenant

MENIELLE, Lieutenant

COUSTY, Sous-lieutenant

 

1e compagnie de mitrailleuses

PALMADE, Capitaine

SUAVIN, Sous-lieutenant

SERRURE, Sous-lieutenant

CHAROLLAIS, Sous-lieutenant

 

2e compagnie de mitrailleuses

PILLERAULT, Lieutenant

DHERVILLE, Sous-Lieutenant

ZABIOLLE, Sous-lieutenant

L'OFFENSIVE DE L'AISNE
(Avril - mai 1917)

La bataille de la Somme a eu comme conséquence le repli de l'ennemi sur la position dite ligne Hindenburg. Cet aveu mal dé­guisé de l'échec subi provoque en France un enthousiasme qui détermine un courant favorable à une grande offensive. Le général NIVELLE, qui a remplacé comme commandant en chef le général JOFFRE, entreprend cette offensive en avril.

La Xe Armée (Général DUCHENE), dont fait partie le Bataillon, doit exploiter les succès remportés par les Ve et VIe Armées. Amenée sur la Marne, elle s'approche peu à peu du futur champ de bataille. Après huit jours passés à Cerseuil, le Bataillon gagne par Vandières-sous-Châtillon, Aougny et Vandeuil, la région nord­-ouest du Grand-Hameau où il passe au bivouac la nuit du 15 avril.

L'attaque française se déclenche le 16 avril au matin. Profitant des dernières heures de la nuit, le Bataillon a franchi la grande crête qui sépare la Vesle de l'Aisne et se trouve prêt à passer cette rivière. A 7 heures, au moment où nos vagues d'assaut abor­dent l'ennemi, le 18e, par le pont nord de Muscourt, débouche en belle ordonnance sur la rive nord de l'Aisne et se porte comme à la manoeuvre sur les bois est de Beaurieux. Une fusée partie à 8h05 de la ferme Beauregard, P. C. de l'Armée, est le signal de la reprise de la marche en avant. La joie est sur tous les visages : c'est la  percée, cette fois, et la marche rapide au delà des orga­nisations allemandes rompues. A  9h30 on atteint le château des Blancs-Sablons au sud de Craonnelle. Le bruit de la bataille paraît proche ; des balles de mitrailleuses viennent mourir jusque-là. Il y a des résistances sans doute. A droite dans la plaine, des chars d'assaut - les premiers - sont immobiles, comme des épaves. La journée se passe sans qu'aucun mouvement se produise et, comme on s'apprête à passer la nuit, l'ordre parvient de rega­gner le bois à l'est de Beaurieux. Le 17, c'est Muscourt, le 18, Crugny. A ce moment on sait que l'ennemi a tenu au Chemin des Dames. Il faut essayer ailleurs.

Dès le 19, le sort du Bataillon est fixé. Le Corps d'Année passe à la VIe Armée et est destiné à opérer au sud de Berry-au-Bac. Après une marche longue et pénible, le 18e arrive à Cormicy le 20 au soir. Le 21, il est en secteur un peu au sud de la cote 108, on face du mont Sapigneul.

Les attaques effectuées dans cette région ont eu peu de succès. Notre ligne a avancé sur la rive droite de l'Aisne, nous avons aussi réalisé quelques progrès vers Berméricourt, mais l'ensemble constitué par le mont Spin, le mont de Sapigneul et la cote 108 n'a pu être enlevé. Cette dernière hauteur a été mordue légère­ment vers son avancée au confluent de l'Aisne et du canal, mais les assaillants se trouvent maintenant sur des mines que l'ennemi actionne à volonté et ont devant eux une énorme carrière aux entrées multiples d'où débouchent et où disparaissent d'invisibles adversaires. Les défenseurs du mont Spin et du mont de Sapigneul, croisant leurs feux, ont fait échouer les attaques de la 40e D. I., et ramené à son point de départ une brigade russe fort malmenée. Les tranchées sont très précaires, la position est dominée de par­tout. En arrière, le canal est battu par l'artillerie et son franchissement ne peut s'effectuer de jour que sous le feu des mitrailleuses. Les passerelles, sans cesse détruites, servent de cibles à l’ennemi.       

Après cinq jours passés dans le secteur des Intrépides le 18e revient aux evirons de Châlons-le-Vergeur. Il y reste peu de temps. Une attaque d’ensemble a été décidée pour le 4 mai. Le 18e a pour objectif le mont de Sapigneul, entre le 9e qui marche sur la cote 108 et deux bataillons du 120e qui font à droite la liaison avec la 3e division (mont Spin). Les mouvements prépara­toires pour placer les compagnies d'attaque ont lieu dans les nuits des 2 et 3 mai. C’est sans la tête de pont de Sapigneul que s'en­tassent les unités. La profondeur du dispositif est nulle, le front étroit. Avec une formation semblable, tous les coups doivent porter. Malgré ces conditions défavorables, les 3e et 5e compa­gnies s'élancent brillamment à l'attaque le 4 mai à 6h50, suivies des 2e et 1re et accompagnées par les quatre sections de la 1re comn­pagnie de mitrailleuses. La première tranchée et son doublement sont atteints par la 5e compagnie mais la 3e à droite, la 2e à gauche ne peuvent aborder la ligne allemande, la 3e un raison des feux qu'elle reçoit, la 2e parce qu'elle subit une contre-attaque qui a été lancée par l'ennemi sur une compagnie voisine partie avant l'heure. De toutes parts des fantassins jaillissent d’abris profonds et organisés de longue date, et de violents combats au fusil, à la grenade et à la mitrailleuse s'engagent entre les deux adversaires. La 5e compagnie perd tous ses cadres : le capi­taine RENARD, le lieutenant RICHARD, les sous-lieutenants MENIELLE, COUSTY, l'aspirant DELGERY, l'adjudant WASSON. Le lieutenant SUAVIN, commandant le peloton de mitrailleuses de première ligne, est également tué. L'adjudant PETIT, de la même compagnie, est blessé ; blessé aussi l'adjudant SIMON, de la 3e com­pagnie, qui a marché à  hauteur de la 5e et atteint avec elle la tranchée allemande. A la 2e compagnie, le lieutenant MASSON est blessé. Des pertes nombreuses subies en quelques minutes ont décidé du sort de l'opération en faveur des Allemands. La 1re com­pagnie ne peut intervenir ; elle a été prise sous le feu dès qu'elle a quitté sa tranchée et a dû se rejeter à droite dans le chemin creux.

Les survivants des unités de première ligne, cloués au sol, s'or­ganisent dans des trous d'obus et continuent à combattre jusqu'à la nuit. Ils réussissent alors à regagner notre ligne, mais en très petit nombre.

On profite des résultats acquis pour amorcer une nouvelle parallèle de départ, qui sera continuée pendant les nuits suivantes. La tête de pont sera ainsi aménagée plus favorablement.

La situation est toujours peu brillante pour les unités en ligne. Le 10, la 4e compagnie a tenté de réaliser une légère avance par surprise. Elle a eu des pertes ; le lieutenant BAILLY a été grièvement blessé.

Le 11, une nouvelle attaque partielle est ordonnée. La 4e enlève la tranchée de Poméranie, mais, contre-attaquée, aux trois quarts détruite, elle doit revenir à son point de départ après une heure et demie de combat. Elle a fait quelques prisonniers, mais le capitaine DE BELINAY et le lieutenant DENIS ont été blessés, l'adjudant MALJEAN a été tué et l'adjudant-chef LIMPAS est tombé aux mains de l'ennemi.

Le 12 au soir, le Bataillon, épuisé par ces huit jours de luttes cons­tantes, quitte le secteur où il a laissé nombre des siens, le tiers de ses cadres et dans lequel de nouvelles attaques ne donneront pas de meilleurs résultats. Plus tard cette région devra même être évacuée jusqu'au canal.

La 5e compagnie qui, dans un superbe élan, s'était emparée à l’attaque du 4 mai des premières tranchées allemandes, est citée à l'ordre du Bataillon :

Le 4 mai 1917, sous la vigoureuse impulsion de son chef, le capitaine RENARD, s'est élancée à l'attaque des positions ennemies malgré un feu violent de mitrailleuses, a pénétré dans les tranchées adverses et a soutenu des combats acharnés au cours desquels elle a perdu tous ses officiers et la majeure partie de ses cadres. A fait preuve, dans cette affaire, du magnifique esprit offensif qu'avait su créer en elle un chef admirable, glorieusement tombé à sa tête.

Le 18e vient aux camps de Châlons-le-Vergeur, puis à Treslon, enfin à Aougny où il stationne du 22 mai au 7 juin. Il gagne alors en huit étapes la région de Vitry-le-François et cantonne à Scrupt et Saint-Vrain jusqu'au 14 juillet, sans autre incident qu'une visite au champ de bataille de Maurupt.

Le 15 juillet, il est embarqué en camions et transporté à Jubé­court. C'est le retour à la IIe Armée, l'occupation des secteurs autour de Verdun.

LES SECTEURS DE VERDUN
(Juillet 1917 - mai 1918)

La rive gauche. - La cote 304 vient d'être le théâtre de combats assez vifs. Après une attaque allemande, la 3e D. I. a repris les tranchées perdues et, lorsque le Bataillon entre, le 20 au soir, dans le quartier Huguenot-est, le secteur est dans la situation imprécise d'une fin de combat. Un travail énergique et une attitude agressive permettent de se couvrir tout en maintenant l'adversaire, mais celui-ci attaque, dans la nuit du 31 juillet au 1er août, le régiment qui a, deux jours avant, relevé le Bataillon et lui reprend deux lignes de tranchées. Rappelé en hâte du camp des Fouchères, le 18° revient en secteur. La 3e compagnie exécute, le 2 août, une contre-attaque partielle par un de ses pelotons. Elle y perd le sous-lieutenant MAITRE et le tiers de l'effectif engagé. Dans la nuit du 5 au 6, la 2e compagnie réalise une avance. Notre position est affermie et la 4e Division quitte définitivement le secteur le 10 août.

D'Ernecourt et Loxeville, où il a débarqué le 19, le Bataillon gagne en une étape Aulnois-sous-Vertuzey, ou il restera du 15 au 27. Dans cette période, la 87e Brigade tient le secteur de Saint-Mihiel. Mais ce n'est qu'un court intermède. Transporté à Cousances-aux­-Bois le 27, le 18e y reste trois jours, puis est amené en camions-autos à Brabant, d'où il gagne les camps de la forêt de Hesse.

Le 1er septembre, la Division entre dans le secteur d'Avocourt. Elle y restera pendant cinq mois et demi.

Le Bataillon est d'abord dans le sous-secteur des Rieux, occu­pant le quartier de la Sorcière. Plus tard, la Division étant dimi­nuée d'un régiment, il sera appelé à occuper successivement tous les quartiers du secteur (Rond-Point, Martin, Joncs).

L'ennemi ne manifeste son activité que par son canon. Il tente quelques coups de main, auxquels nous répondons par des opéra­tions de même nature. Un de ces coups de main, exécuté le 22 oc­tobre par la 2e compagnie, vaut à la 1re section de cette unité, la citation suivante à l'ordre du 2e C. A. :

Le 22 octobre 1917, la 1re section de la 2e compagnie du 18e B. C. P., sous les ordres du sous-lieutenant FERIO, s'est bravement portée à l'attaque d'une tranchée qu'elle avait mission de nettoyer, a livré des corps à corps violents sur quatre points différents, bombardé de gre­nades un abri occupé, infligé des pertes sévères à l'ennemi et, rompant le combat après avoir perdu près de moitié de son effectif, a regagné, dans le plus grand ordre sa tranchée de départ en rapportant ses 20 blessés.

La situation est pénible pendant l'hiver. Le terrain argileux nous oblige à de grands travaux de canalisation qui ne donnent que de médiocres résultats. On harcèle l'ennemi avec l'artillerie, avec les mitrailleuses faisant du tir indirect. Un avion est abattu le 22 septembre par une section de la 2e compagnie de mitrailleuses.

Les périodes de secteur sont longues. Les repos, courts, sont pris loin des lignes, à Waly, à Lavoye, à Rarécourt, à Auzéville.

Le 10, le Bataillon est relevé. Il vient d'abord à l'est de Bar­-le-Duc, à Géry et Loisey où il stationne du 19 au 24 février, puis il gagne en deux étapes la région de Vitry-le-François. Cantonné à Merlaut et Outrepont jusqu'au 15 mars, il y reste au repos, puis est transporté en chemin de fer à Landrecourt d'où il gagne la citadelle de Verdun.

La rive droite. - Depuis quelques jours l'ennemi montre une grande activité. On s'attend à le voir entreprendre une puissante offensive avec l'aide des divisions ramenées du front russe. Le front, de Verdun parait spécialement pris à partie. Les bombardements se succèdent. Les obus à gaz en font les principaux frais, mais les pertes sont nombreuses à la 11e D. I. que la 4e est appelée à relever.

Le 17 soir, le Bataillon est au bois des Fosses, où il relève le 4e B. C. P. Pendant huit jours, il est soumis à des bombardements très vifs ; tous les ravins sont ypérités. Le 21 mars, l'ennemi attaque sur le front de la Somme. A partir de ce moment l'action d'artillerie diminue de violence. Le 25, le 2e R. I. prend le secteur à sa charge ; le Bataillon retourne à Verdun.

Il est renvoyé, le 29, dans le secteur de la cote 344, qu'il tiendra jusqu'au 16 mai (sous-secteur Auvergne).

Violemment disputée à plusieurs reprises depuis 1916, la cote 344 est restée un point battu et souvent visité par les Stosstruppen ennemis. Un puissant coup de main, dirigé le 7 avril sur l'ouvrage du Buffle, vient mourir sur le plateau 344 où il est dissocié, grâce au sang-froid et à l'intrépidité des sergents BAILLY et SEGERS et de leurs mitrailleurs. Fréquemment des reconnaissances, des pa­trouilles se rencontrent dans le ravin Dasserieux ou vers les abris (Kasernen) abandonnés par les Allemands. Des embuscades sont tendues. Mais les grands coups se frappent ailleurs. Peu à peu, le secteur de Verdun se dégarnit et les défenseurs s'étirent pour libérer les camarades allant à la Bataille. C'est ainsi que la Division est retirée. Le 17 mai, le 18e est embarqué à Baleycourt, transporté à Neuville-sur-Orne et Laimont où il reste au repos jusqu'au 25. Nouveau déplacement en chemin de fer, le 26, qui conduit le Bataillon dans la région d'Estrées-Saint-Denis, à Moyvillers où il se prépare à cantonner.

ENCADREMENT DU BATAILLON AU 26 MAI 1918

État-major et  S.H.R.

 MM VITAL, Chef de Bataillon, Commandant

  SIMONIN, capitaine adjudant major

  ­CHEVALLIER, Lieutenant adjoint

  QUEYROY, lieutenant, commandant le peloton de pionniers

  MOUNIER, officier d’approvisionnement

  SOURISSEAU, officier de détail

  PERE, médecin-major

  SASPORTES, médecin aide-major

  DAUMAS, pharmacien aide-major

  Le Père. DECISIER, aumônier

 

1ere compagnie

CHRETIEN, Capitaine

BABOU, Lieutenant

DESBOIS, Lieutenant

DORIZON, Sous-lieutenant

 

2e compagnie

DROT, Lieutenant

SEMON, Sous-lieutenant

FERIO, Sous-lieutenant

DHERVILLE, Sous-lieutenant

 

3e compagnie

DE MADIERES, Capitaine

CRONIER, Lieutenant

VOSGIEN, Sous-lieutenant

MAGNANT, Sous-lieutenant

 

4e compagnie

SAUBADE, Capitaine

DENIS, Lieutenant

SERIN, Sous-lieutenant

BRISSE, Sous-lieutenant

 

5e compagnie

DE BUTLER, Capitaine

DIEU, Lieutenant

SEEUWS, Sous-lieutenant

VALLET, Sous-lieutenant

 

1e compagnie de mitrailleuses

DE PERINI, Lieutenant

THELIER, Lieutenant

 

2e compagnie de mitrailleuses

PILLERAULT, Capitaine

ZABIOLLE, Lieutenant

DE SAINT-BLANQUAT, Sous-lieutenant

LA RETRAITE DE L'AISNE
(27 mai - 5 juin 1918)

A peine l'installation à Moyvillers est-elle commencée qu'une nouvelle circule : « L'ennemi a attaqué la nuit dernière. » Bientôt arrivent des précisions : par une poussée extrêmement puissante dans la région au nord de l'Aisne, l'adversaire a rompu notre front, franchi la rivière et s'avance rapidement vers le sud, en direction générale de Château-Thierry. La Division, disponible, va être jetée dans la bataille.

En effet, le Bataillon, transporté en camions-autos, est, le soir même, à Billy-sur-Ourcq. Le lendemain matin 28 mai, une marche d'une quinzaine de kilomètres le conduit dans la région sud-est de Soissons, sur la route de marche de l'ennemi.

La Division a un front de 15 kilomètres. Placé entre le 9e B. C. P. à gauche et le 147e R. I. à droite, le Bataillon tient le plateau des Crouttes et défend le couloir situé entre Muret et Crouttes et Nampteuil-sous-Muret. Ses réserves sont autour de la ferme de Launoy. En avant, des troupes se battent, mais on sait qu'elles ne pourront tenir au delà de la journée. Le lendemain, sans aucun doute, le Bataillon sera en plein combat.

Dès 8 heures, le 29, le contact s'établit, à Mast et Violaines, avec la 4e compagnie, à Nampteuil avec la 5e. L'ennemi fonce. Il est accueilli à coups de fusil et de mitrailleuses. Devant notre position il y a un réseau qui forme obstacle à la poussée brutale de l'adver­saire. Malheureusement ce réseau, noyé dans des moissons déjà hautes, ne peut être entièrement flanqué par les feux de groupes de combat étirés sur un front considérable. Il permettra cependant d'arrêter l'ennemi pendant toute la journée.

Devant notre résistance, les Allemands montent une attaque ; l'artillerie, les minenwerfer moyens et légers font une prépara­tion à la suite de laquelle l'infanterie se lance à l'assaut. Elle est arrêtée par nos feux et doit se terrer devant les fils de fer. Alors s'engagent une série d'actions partielles qui ont pour but de briser notre front pour prendre à revers les îlots de résistance.

Cette manoeuvre réussit en partie à notre droite. L'ennemi s'at­taque à un bataillon du 149e très réduit par les pertes de la veille, et qui s'est arrêté à hauteur de notre position. Par la brèche qu'il produit, il entre en coin entre le 18e et le 147e, gravit, à la faveur des couverts, les crêtes boisées 178-180 et prononce l'en­veloppement du I/147. La 3e compagnie, qui reçoit des coups de revers, refuse sa droite pour couvrir le flanc du Bataillon et est appelée peu après à entrer dans le bois des Bovettes, formant échelon défensif. A son tour la 4e, vivement attaquée de front, recevant des coups des crêtes boisées placées en arrière d'elle, a son capitaine tué, un lieutenant blessé, perd en quelques minutes un certain nombre de sous-officiers et de chasseurs et doit entrer dans le bois. Ces deux compagnies, avec la 2e qui leur a été envoyée en soutien et les sections de mitrailleuses qui leur sont affectées, contiendront l'adversaire jusqu'à la nuit.

A gauche, au contraire, l'ennemi ne peut progresser. Guetté et attendu à bout portant par la section de l'intrépide sous-lieute­nant VALLET, il laisse devant nos fils de fer nombre des siens et s'enfuit à la faveur des moissons ; il réussira plus tard à se glisser dans nos lignes, mais il en sera lui-même chassé par nos contre-­attaques. Le capitaine DE BUTLER, qui commande en ce point, ne permettra pas à l'ennemi de s'installer chez lui. Il lance ou conduit lui-même sept contre-attaques qui toutes sont couronnées de suc­cès, et lorsque sa compagnie, dépensée presque entièrement, ne peut plus fournir un effectif raisonnable pour faire effort contre la poussée, il jette une à une dans l'action les sections de la 1re com­pagnie qui lui a été envoyée en soutien. Le lieutenant SEEUWS est tué, le lieutenant DIEU et le sous-lieutenant VALLET mortellement blessés ; le lieutenant BABOU est également mis hors de combat. Les 1e et 5e compagnies perdent plus du tiers de leur effectif, mais l'adversaire ne fait aucun progrès de ce côté. Et cet échec de la 1re division de la Garde a un écho dans le Regensburger-Anzeiger, fouille bavaroise trouvée quelque temps après dans un bivouac abandonné et où le narrateur s'exprime en ces termes :

« En arrière de la position avancée, se fit sentir la résistance opiniâtre d'une nouvelle division française : La 4e, une division d'élite.

Elle comprend les célèbres bataillons de chasseurs, 9e et 18e, et les braves 120e et 147e R. I.

Le 1er régiment de la Garde réussit, après des luttes violentes, à pénétrer jusqu'à Muret et Crouttes où il eut à subir de vives contre-attaques des chasseurs français. Il se trouvait vers le soir en face de la lisière du petit bois qui s'étend au Sud du village ­et qui était solidement tenu par l'ennemi avec un grand nombre de mitrailleuses. C'est seulement dans la nuit que le bois put être ris par un mouvement d'enveloppement du I/II Garde-Régiment. La journée avait été très chaude... »

Malgré tant d'héroïsme, le 18e ne peut songer à rester sur le terrain. Dans cette journée, l'ennemi avançant à grands pas à notre droite est entré à Fère-en-Tardenois. C'est maintenant face à l'est qu'il va falloir se battre.

Ramoné en réserve à Nanteuil-sur-Ourcq, dans la nuit du 29 au 30, le bataillon passe la journée en ce point. Il est disloqué dans l'après-midi pour aider certains éléments de la Division. Un regrou­pement partiel se produit dans la nuit, mais deux compagnies sont cependant conservées par le 147e et c'est avec de faibles effectifs que le Bataillon soutiendra, le 31, l'effort de nombreuses troupes allemandes.

Dès le matin, le combat reprend. En arrière des troupes placées sur les pentes nord de l'Ourcq, et de celles qui sont à notre droite vers Brény, une partie des unités, avec le capitaine DE BUTLER, s'organise au sud de Nanteuil face à l'est, l'autre partie avec le capitaine CHRÉTIEN défend, face au nord, les passages de l'Ourcq à Vichel-Nanteuil. Deux compagnies sont toujours retenues auprès du 147e, au sud de Brény. Bientôt tous les éléments placés en avant refluent vers l'Ourcq et le Bataillon est en première ligne. Il tient jusqu'à 14 heures, résistant à la poussée en équerre de l'ennemi, qui a franchi l'Ourcq en aval de Vichel-Nanteuil et atteint à l'est la route Lontgru-Wadon. Là encore les contre-attaques de la 4e et de la 5e compagnies brisent l'élan de l'adversaire qui n'ose aborder franchement la position. Épuisées par une chaleur étouffante, les compagnies exécutent leur repli sous un violent tir d'artillerie qui coûte la vie au lieutenant DE PERINI, contournent à l'ouest le bois de Latilly. Les débris du Bataillon vont s'engager sur Neuilly-Saint-Front, indiqué la veille comme axe de retraite lorsqu'on apprend que le village est aux mains de l'ennemi depuis 10 heures. Latilly, d'autre part, vient d'être occupé par eux. C'est entre les deux mâchoires prêtes à se refermer que les derniers chasseurs réussissent à passer, accompagnés dans leur retraite par le feu des mitrailleuses ennemies.

De ce combat disproportionné le Bataillon sort en poussière ; cette formation diluée à l'excès lui a valu d'échapper à une destruction totale. Mais le soir, à Saint-Gengoulph où il a été envoyé, les isolés, des fractions se rallient. Au matin du ler juin, le 18e est une force de 600 fusils et de 12 mitrailleuses - la seule que la Division possède encore, et, lorsque dans la soirée, les cavaliers, accourant à la bataille, prendront le contact avec les chasseurs, ils pourront affirmer que sur cette route de Paris, qu'ils viennent de suivre, ils n'ont pas rencontré un seul no 18.

La poussée allemande reprend le 1er juin. Cette fois, la 4e D. I. appuie à gauche, pour arrêter l'ennemi qui essaie de contourner par le sud la forêt de Villers-Cotterêts et de marcher sur Meaux. Elle opère en liaison avec la cavalerie, ne peut empêcher l'ennemi d'entrer à Dammard, mais se maintient sur le Ru d'Alland, à Saint-Quentin et à Chézy. Le Bataillon est vers Saint-Quentin, qu'il tient par une compagnie. Pour donner à l'attaque de la cavalerie une base de départ, la 1re compagnie (réduite à 62 hommes), enlève à Montemafroy, le 2 juin, une compagnie allemande d'effectif double, qui est établie aux lisières du hameau. Cette brillante opération, dirigée par le capitaine CHRÉTIEN, ne nous coûte aucune perte et nous rapporte par contre 29 prisonniers, dont 2 officiers (un commandant de bataillon) ; nous nous emparons de 12 mitrailleuses. La 1re compagnie est citée à l'ordre de l'Armée :

Superbe unité, qui en Champagne, a fait prisonnière une compagnie de la Garde, qui sur la Somme s'est signalée particulièrement à la prise de Berny, la 1re compagnie du 18e B. C. P., sous le commandement du même chef, a attaqué le 2 juin 1918 après 6 jours de durs combats, un îlot de village occupé par un effectif double, a enlevé la position, facilitant ainsi grandement le déclenchement de la contre-offensive d'un corps voisin. A fait 29 prisonniers dont 2 officiers, et rapporté 6 mitrailleuses.

Pendant ce temps la 5e compagnie à Chezy-en-Orxois soutient plusieurs attaques allemandes qu'elle repousse.

L'offensive du 2e Corps de Cavalerie a eu pour résultat de fixer l'ennemi sur ce front où aucune nouvelle action importante ne se produit à partir du 2 juin. Le 11, le Bataillon est reporté en réserve dans le bois de Cerfroid, d'où il repart, le 6, après avoir été relevé par des bataillons de chasseurs de la 47e D. I. Il vient alors à Vincy-Manoeuvre, à Lizy-sur-Ourcq, puis enfin à Rozoy-­en-Multien et à Étavigny où il se reconstitue.

A la suite des durs combats livrés entre le 29 mai et le 2 juin, les unités suivantes sont citées :

 

 

A L'ORDRE DE LA DIVISION
La 5
e compagnie.

A eu, le 29 mai 1918, une tenue magnifique, contenant un ennemi très supérieur en nombre, le contre-attaquant sans relâche et lui impo­sant l'arrêt de sa progression en même temps qu'elle lui infligeait des pertes sérieuses. Le 31 mai, bien que très diminuée, a soutenu avec l'adversaire un combat inégal, lui a fait chèrement payer un succès partiel et l'a mis dans l'impossibilité d'en tirer profit. A montré, au cours de ces affaires, une attitude nettement agressive témoignant d'un moral à toute épreuve.

 

 

A L'ORDRE DU BATAILLON

La 4e compagnie.

Dès le début de la campagne, s'est fait remarquer par une ardeur combative qui ne s'est jamais démentie. A montré en particulier un superbe allant au combat du 11 mai 1917, à la cote 108 en s'emparant d'une tranchée ennemie. Vient encore de se signaler pendant les journées des 29 et 31 mai 1918, en imposant par son attitude résolue à un adver­saire très supérieur en nombre, l'obligeant à ralentir sa progression et lui infligeant des pertes sévères. Très diminuée elle-même comme effec­tif, a conservé, dans les journées suivantes, son entrain et sa vigueur.

 

 

La 1re compagnie de mitrailleuses.

Compagnie d'une superbe tenue au feu, qui a donné dès preuve de sa valeur en Champagne, à Verdun, sur la Somme et sur l'Aisne. Dans les combats livrés du 28 mai au 5 juin 1918, s'est montrée à hauteur de sa réputation et, par sa ténacité, sa ferme volonté d'arrêter l'adversaire, a largement contribué à enrayer de puissantes offensives en infligeant à l'ennemi des pertes très sérieuses.

Le Bataillon passe à Rozoy cinq semaines au contact d’unités américaines récemment débarquées et à l’instruction desquelles il participe. Le 12 juillet, il est de nouveau embarqué en camions et transporté dans la région de Rebais.

 

 

LA DEUXIÈME BATAILLE DE LA MARNE
(15 juillet - 8 août 1918.)

Dès son arrivée à Saint-Ouen, le bataillon est alerté : la date du 14 juillet parait en effet devoir etre celle que les Allemands choisiront pour attaquer. La journée se passe cependant sans incidents. La Fête Nationale est célébrée, et une séance sportive improvisée réussit fort bien.

Le 15 au matin, le 18e est mis en route. Dans la nuit l'ennemi a attaqué, a réussi à franchir la Marne et son avance crée, au sud de la rivière, une « poche » dont Saint-Agnan (sud-ouest de_Dor­mans) constitue l'extrémité méridionale. La Division est portée vers cette région pour contre-attaquer.

Débarqué à Margny et cantonné, le 16 au matin, à Fransauge, le Bataillon est dirigé dans l'après-midi sur Les Glapieds, puis mis à la disposition de la 20e Division dans le bois de Rougis. Des contre-attaques ont déjà eu lieu. Le 2e R. I., par une vigoureuse progression, a gagné du terrain vers la Marne, mais à sa gauche, les Américains n'ont pas réussi à prendre pied sur les hauteurs boisées au nord de Saint-Agnan. Le Bataillon doit reprendre cette attaque manquée, le 17 à 8h15.

Les ordres parviennent tard ; l'heure du commencement de l'attaque doit être reportée à 11 heures, mais l'artillerie, qui a déjà commencé sa préparation, a en même temps sonné l'alerte aux Allemands. Aussi, dès 10h45, les tirs de contre-préparation ennemis s'abattent sur la zone boisée occupée par le Bataillon. Les lisières sont particulièrement visées et les premières vagues d’assaut subissent de  ce fait des pertes assez sensibles. Malgré la rencontre de réseaux français qu'il faut couper, sur des pentes, en vue de l’ennemi, les 2e et 3e compagnies s'élancent  rapidement avec les pelotons de mitrailleuses qui les accompagnent. Elles dévalent

 
 

jusqu’au Ru des Vieux Prés, s'emparent d’Évry et  remontent les talus à pic qui servent d'avancé à la position allemande. La marche par une température accablante, est particulièrement pénible. L'ennemi' a essaimé des mitrailleuses qui gênent la progression, mais n'empêchent cependant pas les compagnies d'atteindre les lisières des bois au sud de la ferme des Maréchaux. La 3e compagnie, à gauche, prend pied dans un boqueteau avancé où se livrent des combats violents. La 2e à droite a réussi en combinant son action avec celle d'un régiment voisin à capturer une compagnie allemande et 12 mitrailleuses. La 4e, qui était en soutien est venue se fondre dans la ligne et les 1re et 5e jusque-là réservées, franchissent à leur tour le Ru des Vieux Prés pour aborder le front ennemi.

A ce moment des mitrailleuses ennemies se dévoilent à notre gauche causant des pertes sévères dans les rangs de la 3e compagnie qui doit s'abriter et voit son élan brisé.

Ou apprend bientôt que la division voisine, qui devait attaquer en même temps que la 20e et se charger de cet adversaire gênant ne doit pas bouger ce jour-là. Dés lors, l'ennemi peut se ressaisir et notre avance se trouve limitée aux bois,  malgré les nombreuses tentatives pour en forcer les lisières. Toutes les contre-attaques de l'adversaire sont d'ailleurs enrayées. En fin de journée les premières lignes sont  à 200 mètres l’une de l’autre. L’ennemi, qui a canonné toute la journée la lisière des bois de Rougis, ne parait pas décidé à passer à l'offensive.

La journée du 18 se passe dans le calme, et le Bataillon vient en réserve le soir dans le bois de Rougis.

Le 20, la 4e Division se porte en avant et pousse jusqu'à la Marne. L’ennemi a repassé la rivière et en défend la rive nord mais il doit, sous la poussée de la VIe Armée, qui combine ses effort avec ceux de la Xe (armée MANGIN, attaquant en direction de Fère-en-Tardenois) , lâcher peu à peu le terrain.

Dans la nuit du 24 au 25, le 18e franchit la Marne sur des passerelles de fortune que les avions  de bombardement  ennemis cher­chent à détruire. Il relève dans la forêt de Ris le 346e R. I. et, en deux jours de dur combat, atteint, le 26 au soir, le Ru de la Belle Aulne, vers le château du Charmel. Il a trouvé devant lui son, adversaire de l'Aisne, la 1re Division de la Garde, qui défend avec acharnement cette partie de bois. Des mitrailleuses dissimulées dans les fourrés,  énergiquement. servies, nous obligent à livrer une série de combats extrêmement meurtriers où-la valeur indi­viduelle est le principal facteur de succès. Les canons de 37 et les mortiers Stokes font merveille ; ils nous permettent de mettre à la-raison les ennemis qui nous sont opposés et dont un certain nombre se font tuer sur leurs pièces. Les actes de témérité sont nombreux. Le caporal CHAMPION tue un Allemand et, le prenant à bras-le-corps, le jette sur la pièce qu'il défendait pour en arrêter le tir. La mitrailleuse et les servants sont capturés. Les chas­seurs de la 4e compagnie rivalisent d'audace. Le capitaine DE BUTLER, toujours calme, se promène en avant des lignes, cher­chant les nids de résistance. Son exemple enflamme la 5e compa­gnie qui déterminera, le 26 au soir, la rupture du front ennemi et méritera la belle citation suivante :

Les 25 et 26 juillet 1918, vigoureusement entraînée par son chef, le capitaine DE BUTLER, a livré à l'ennemi une série de combats sous bois extrêmement meurtriers, au cours desquels elle a pris nettement la supériorité sur l'adversaire, l'attaquant sans relâche et détruisant peu à peu ses nids de résistance. Dans un dernier effort, a enfoncé la ligne défendue par l'ennemi, lui a fait quelques prisonniers, lui a pris 11 mitrail­leuses et a permis la marche en avant de la Division. Superbe unité déjà citée pour sa belle tenue aux combats de mai 1918.

La marche en avant reprend le 27 au matin. L'ennemi a aban­donné toute la forêt de Ris, mais tient dans Ronchères et le bois Meunière.

La journée du 28 donne aux Américains Ronchères, au 120e le bois de la Défense. Les 3e et 4e  compagnies gagnent dans la direction du bois Meunière, dont les avancées sont fortement occupées. A 18h30, après une énergique et courte préparation par mortiers Stokes, la 3e  compagnie saute sur la ligne allemande, lui fait 38 prisonniers (3e Chasseurs) et capture deux mitrailleuses. Mais en arrière de cette ligne, des lisières de bois, partent des feux très vifs. Le sous-lieutenant MAGNANT est tué, et notre ligne, clouée au sol, très en flèche par rapport à ses voisins, doit s'enterrer à hauteur de la route de Ronchères au Télégraphe détruit. La 4e s'échelonne sur le flanc droit de la 3e ; elle subit en peu de temps des pertes sévères, les feux partant du Télégraphe détruit prenant ses sections d'enfilade et même de revers. Les 2e et 1re compagnies étaient les flancs de l'attaque. La 5e est en réserve un peu en avant de l'Ourcq.

La journée du 29 n'amène pas une amélioration sensible dans la situation. Les 3e et 4e  compagnies renouvellent leurs efforts pour atteindre la lisière mais ne peuvent parvenir à avancer en raison de la position prise par l'adversaire sur leur flanc. A droite, le 120e ne réussit pas à progresser ; à gauche, les Américains sont bloqués dans Ronchères d'où ils ne peuvent déboucher. Nouvelle tentative le 30 au matin, par le 147e qui a remplacé le 120e. Les Allemands tiennent toujours au Télégraphe détruit. La décision sera obtenue par un succès américain plus à l'ouest (bois des Grim­pettes) qui amènera le repli de toute la ligne.

Le 31 juillet, le Bataillon traverse vivement la partie ouest du bois Meunière et fait un bond en avant de plus de 3 kilomètres. Mais une nouvelle ligne ennemie s'est constituée, et les éléments de tête débouchent difficilement de la lisière nord-ouest du bois Meunière. La brigade américaine placée à gauche du 18e appuie peu à peu dans le secteur du Bataillon, cherchant le couvert. Une série d'attaques décousues la met en possession, le 1er août, des avant-lignes allemandes, en particulier de la ferme Bellevue. Le Bataillon en liaison avec elle atteint la région des carrières à l'est de Cierges, puis, le 2 au matin, se porte à l'attaque du Pâtis de Cha­rmory. L'ennemi cède partout et se replie rapidement. Vers 14 heu­res, nous avons atteint le village de Coulonges et les lisières nord du bois de Rognac. A 19h30, le 18e est aux lisières nord du bois d'Aiguizy.

Le 3 août, il dépasse ce bois, vient entre Arcis-le-Ponsart et la ferme Longeville, puis est porté, à la nuit sur la ferme des Petites ­Chezelles où il reste jusqu'au 4 au soir. En avant, le 147e a franchi l'Ardre et occupe le plateau de la ferme La Cense ; les Américains pénètrent dans Fismes.

De nouvelles forces américaines entrant en ligne, le Bataillon glisse à droite, revient vers Arcis-le-Ponsart, et est ensuite repoussé en avant par le jeu des relèves intérieures de la Division. Le 6 août, il est à Courville et dans le ravin en avant du village. Le 8 août, il est relevé et se reporte sur Passy-Grigny, d'où il est transporté à Épense (11 août).

L'effort du Bataillon pendant cette période du 15 juillet au 8 août est enregistre dans la citation suivante a l'ordre de la VIe armée :

Solide et superbe Bataillon, à la ténacité et mordant duquel l'ennemi lui-même a rendu hommage.

Sous le commandement du Chef de Bataillon VITAL, a, au cours de dix-sept jours consécutifs de combats opiniâtres (du 17 juillet au 3 août 1918), refoulé l'adversaire sur plus de 30 kilomètres de profondeur, fait 153 prisonniers et conquis 25 mitrailleuses, un lance-bombes et trois lance-flammes.

Indépendamment de la citation obtenue par la 5e compagnie et dont il est fait mention plus haut, les unités suivantes ont égale­ment été citées à l'ordre du Bataillon pour leur belle tenue et leur ardeur au combat :

La 2e compagnie du 18e B. C. P. :

S'est brillamment portée à l'attaque, le 17 juillet, malgré les diffi­cultés de toutes sortes rencontrées sur sa route. A réussi à prendre pied dans un bois qu'elle avait reçu comme objectif, contribué à l'encercle­ment d'une compagnie ennemie, capturé 40 prisonniers, rapporté 8 mi­trailleuses, 3 lance-flammes et un lance-bombes. A résisté victorieuse­ment aux contre-attaques adverses et maintenu tous ses gains.

La 3e compagnie du 18e B. C. P. :

Le 17 juillet 1918, s'est portée à l'attaque d'un bois avec un entrain magnifique, dans un terrain difficile, entièrement vu de l'ennemi et battu par son artillerie, a soutenu pendant quatre heures un combat acharné, réalisant une avance de près de 2 kilomètres, s'emparant de deux mitrailleuses et faisant des prisonniers. Le 28 juillet, malgré plusieurs jours de dures fatigues, lancée par le capitaine DE MADIÈRES à l'assaut d'une forte position, a détruit un centre de résistance, ramené 38 prisonniers et rapporté deux mitrailleuses.

La 2e compagnie de mitrailleuses du 18e B. C. P. :

Le 17 juillet 1918, à l'attaque du bois des Maréchaux, a puissamment aidé les compagnies de première ligne à briser les résistances ennemies puis à conserver le terrain conquis. S'est portée hardiment aux endroits dangereux, prenant sur l'adversaire la supériorité du feu et s'opposant à toutes ses tentatives. S'est encore fait remarquer par des interventions audacieuses au cours des combats des 25, 26, 28 juillet et du 1er août.

Le peloton de 37 et mortiers d'accompagnement :

Peloton d'élite, d'une ardeur et d'une audace reconnues par tous. A été magnifique d'entrain, d'activité et de hardiesse, pendant les combats du 17, du 25, du 26 et du 28 juillet 1918, préparant la voie aux fractions d'attaque, combattant en liaison intime avec elles et ne reculant devant aucun risque pour assurer la destruction des mitrail­leuses adverses. S'est affirmé un organe de combat de premier ordre et a permis d'obtenir de beaux succès.

 

 

TROISIÈME BATAILLE DE CHAMPAGNE
(Septembre - octobre 1918.)

Après trois semaines passées à Épense, le 18e gagne, le 3 sept­embre, Saint-Mard-sur-le-Mont où il reste dix jours. Puis il reprend par La Croix-en-Champagne le chemin qu'il suivait déjà le 1er mars 1915. Il s'arrête à Somme-Tourbe, pendant que deux compagnies vont en secteur avec le 9e Bataillon. Le restant des compagnies relève le 9e le 22 septembre. Depuis plusieurs jours déjà se mani­festent tous les indices d'une prochaine et puissante attaque. On apprend bientôt qu'elle aura lieu le 26.

C'est la 3e Division qui prend la tête du Corps d'Armée pour occuper le terrain soumis pendant sept heures à une préparation d'artillerie extrêmement énergique. Le Bataillon est relevé le 25 au soir. Les derniers éléments quittent le secteur au moment où com­mence la canonnade.

A 5h25, nos vagues d'assaut se portent en avant et peuvent marcher sans être inquiétées pendant plusieurs kilomètres. Au delà de Tahure des résistances se font sentir ; devant Manre la 3e Division échoue.

La 4e a suivi son mouvement, prête à l'appuyer. Le passement de lignes a lieu le 29 matin. A ce moment, le 18e reçoit comme pre­mier objectif Manre et la crête au delà, comme direction ultérieure Liry.

Les compagnies de première ligne s'ébranlent à 10 heures, fran­chissent la crête 180, qui domine Manre au sud et, prises tout de suite sous le canon et sous le feu de mitrailleuses habilement dissi­mulées, elles dévalent à toutes jambes les pentes qui conduisent à Manre, s'écroulent sur le village, d'où l'ennemi, surpris par cette brusque irruption, s'enfuit soit vers le nord, soit par les deux extrémités du couloir qui constitue la vallée de l'Alin. 24 prison­niers restent entre nos mains ; les autres - la plus grande partie - ont glissé vers la droite et vont se faire prendre par le 147e.

Le fond marécageux constitué en obstacle par l'ennemi est rapidement franchi et la 1re  compagnie vient sur la crête au nord du village, qui est son premier objectif. Elle doit y marquer un temps d'arrêt, car les voisins ont été moins vite ; à droite, la pro­gression paraît être en bonne voie ; à gauche, le 120e a été arrêté par des mitrailleuses, et cet adversaire non détruit constitue sur notre propre flanc un sérieux danger.

Ce n'est cependant pas le moment de s'arrêter : notre propre mouvement aidera celui des éléments de gauche. Les 4e et 5e comp­agnies repartent, suivies de la 1re compagnie de mitrailleuses. Elles atteignent les tranchées de Bingen, d'où elles repoussent l'ennemi et gagnent encore 500 mètres au-delà ; le reste du Bataillon vient à Manre.

Ce mouvement en avant a permis au 120e de gagner un peu de terrain. Il est maintenant dans la région de Pont-Naurelle. Le 147e à droite est à notre hauteur. Un nouveau bond peut être fait.

Exécuté à 17h15, il conduit les éléments avancés aux anciennes Carrières, où l'on fait encore quelques prisonniers et où l'on s'em­pare de deux canons anti-aériens. Pendant cette dernière opéra­tion, la 2e section de la 5e compagnie, conduite par le sous-lieute­nant CARTAN, placée sur le flanc gauche de l'attaque, qu'elle couvre, se trouve en présence de forces importantes sur lesquelles elle se jette délibérément. Ce geste audacieux est couronné de succès et vaut à la section la belle citation suivante à l'ordre de la 4e Division :

Le 29 septembre 1918, réduite à 18 gradés et chasseurs, a attaqué sans hésiter une batterie d'artillerie et son soutien et, après un rapide engagement, a réussi à faire 252 prisonniers et à s'emparer d'un impor­tant matériel dans lequel figuraient quatre canons de 77 et 17 mitrail­leuses.

Aucun autre mouvement ne peut être tenté le jour même. Les éléments avancés, du Bataillon sont à 2 kilomètres en avant du 120e. Pendant la nuit, le Bataillon se couvre face à l'ouest.

Le 30 au matin, l'attaque est reprise. Les 5e et 1re compagnies atteignent rapidement le bois H66, où elles font encore 37 pri­sonniers et s'emparent de deux mitrailleuses, puis continuent en direction de Liry au delà du chemin de la Croix-Gilles à la Croix des Soudans; elles se heurtent à une puissante résistance. La 5e com­pagnie est contre-attaquée, mais après un corps à corps violent elle rejette l'adversaire dans le Fond des Dunes. Sur les pentes de cette cuvette, un camp ennemi est rempli de troupes. Un effort encore et toutes ces troupes (un bataillon environ) sont à nous ; mais au moment où les compagnies, ardentes à poursuivre, repren­nent leur marche, des mitrailleuses placées à notre gauche, vers la Croix-Gilles et vers les grands pylônes que l'on aperçoit de tout le champ de bataille, ouvrent un feu violent et obligent tout le monde à se terrer. Le capitaine DE BUTLER est blessé. L'attaque doit stopper par suite de l'arrêt de la progression dans le secteur à gauche du Bataillon. Malgré plusieurs tentatives pour se porter en avant, la ligne est définitivement clouée au sol par les feux partant de la Croix-Gilles et de la Croix des Soudans sur lesquelles aucune attaque n'est dirigée.

Le lendemain matin, 1er octobre, une attaque générale est ordon­née. Les 2e et 3e compagnies ont remplacé en première ligne les 5e et 1re. L'ennemi s'est renforcé. Il renouvelle les procédés de défense qui lui ont si bien réussi la veille : flanquement par mitrail­leuses et contre-attaque à courte portée. Il ne réussit pas à nous rejeter du terrain conquis et les deux lignes restent en présence à 100 mètres environ. A nos côtés, les attaques ne réussissent pas mieux.

Elles sont reprises le 2 octobre et conduisent è des combats de même nature. A cinq reprises différentes l'ennemi nous contre-­attaque sans succès. Nous parvenons à lui enlever encore une mitrailleuse. Il bombarde pendant toute la journée nos positions avec des obus à gai qui nous causent des pertes sérieuses. Au cours de ces deux journées tout le monde a rivalisé d'ardeur : une men­tion spéciale est accordée à la 4e section de la 2e compagnie de mitrailleuses qui est citée à l'ordre de la 4e division :

Sous les ordres du sergent MAGOT et des caporaux BERNARD et GAUD, a fait preuve, les 1er et 2 octobre 1918, d'une belle bravoure et d'une magnifique ténacité. Malgré le feu des mitrailleuses adverses, malgré les pertes subies, n'a jamais interrompu son tir, forçant l'adversaire à se terrer, lui tuant du monde et brisant toutes les contre-attaques diri­gées sur la crête que nous venions de conquérir.

Le soir, le Bataillon est relevé. Pendant les journées suivantes, il sera soit en réserve de division, soit, avec la Division elle-même, en deuxième ligne. Les succès de la bataille de Champagne s'affir­ment chaque jour malgré les puissantes résistances de l'ennemi. C'est sur un autre front qu'il faut maintenant achever la guerre. Le 15 octobre, le Bataillon, embarqué à Gizeaucourt, est amené à Moyen dans le secteur de Lorraine.

Les combats livrés par le 18e pendant cette période lui valent la belle citation suivante à l'ordre de la IVe Armée :

Magnifique Bataillon qui, dans toutes les circonstances de la guerre, continue à montrer les mêmes vertus militaires. Sous le commandement du Commandant VITAL, pendant la période du 28 septembre au 2 octobre 1918, a, par son ardeur dans les attaques, contraint l'ennemi à aban­donner les positions les plus solides en lui faisant subir de lourdes pertes.

A progressé de plus de 5 kilomètres et s'est emparé d'une batterie attelée et de trois canons de gros calibre, de 34 mitrailleuses lourdes, d'une grande quantité de matériel et de 350 prisonniers.

Cette citation, qui complète celle déjà obtenue à l'occasion des opérations de la Marne, donne au Bataillon le droit au port de la fourragère aux couleurs du ruban de la Croix de guerre, qui lui est congrée par ordre n° 133F du Général commandant en Chef, on date du 27 octobre 1918.

 

SECTEUR DE LUNÉVILLE
(15 octobre - 11 novembre.)

De Moyen, le Bataillon est transporté à Marainviller. Du 15 octobre au 10 novembre, alternant avec le 9e B. C. P. il va tenir la vallée que suit la grande voie ferrée de Nancy à Strasbourg. Ce secteur calme sert en même temps de repos en attendant de nouvelles affaires. On sait que des troupes affluent. L'ennemi doit le savoir aussi sans doute, car il parle d'un armistice.

Les événements se précipitent : Ludendorff mis à la retraite ; le Kaiser en fuite vers la Hollande ; les délégués allemands venant demander les conditions du Maréchal Foch...

Tout cela n'empêche pas les préparatifs militaires. Le 10, les deux divisions sont accolées pour l'attaque et le 18e, en entier à Marainviller, est prêt à se porter en avant.

Le 11 novembre marque la fin des hostilités.

ENCADREMENT DU BATAILLON AU 11 NOVEMBRE 1918

État-major et  S.H.R.

 

        Chef de Bataillon VITAL        Commandant

 Capitaine SIMONIN  Capitaine adjudant major

 Lieutenant ­CHEVALLIER  Officier adjoint

 Lieutenant SOURISSEAU Officier de détail

 Lieutenant MOUNIER  Officier d’approvisionnement

 Médecin-major PERE

 Médecin aide-major SASPORTES

 Pharmacien aide-major DAUMAS

 

1ere compagnie

Capitaine CHRETIEN

Lieutenant THELIER

 

2e compagnie

Lieutenant DENIS

Lieutenant FERIO

Lieutenant DHERVILLE

Sous-lieutenant BRUNEL

 

3e compagnie

Capitaine DE MADIERES

Lieutenant PAQUET

Lieutenant VOSGIEN

 

4e compagnie

Lieutenant SERIN

Lieutenant GARDINIER

 

5e compagnie

Lieutenant HUGO

Lieutenant DEROCHE

 

6e compagnie (C.I.D.)

Lieutenant SEMON

Lieutenant LE GALL

Lieutenant PETAUTON

Lieutenant BERAUD

 

1re compagnie de mitrailleuses

Lieutenant CHAROLLAIS

Lieutenant DE SAINT-BLANQUAT

 

2e compagnie de mitrailleuses

Lieutenant FERMIOT

Lieutenant ZABIOLLE

Lieutenant CHAMSKI

 

L'ALSACE ET LE PALATINAT

Alors c'est la marche triomphale à travers les pays reconquis. Les clairons du Bataillon sonnent joyeusement en franchissant, le 18 novembre, à 10 heures, entre Remoncourt et Moussey, la frontière factice créée par les Allemands en 1871. On cantonne dans la région d'Azoudange du 18 au 20, à Hellering le 21, à Schœnbourg, le 22. On est en Alsace maintenant et, le 23, après une marche à travers des villages pavoisés, le 18e arrive à Bouxwiller où une réception enthousiaste lui est faite. Toute la population, vétérans en tête, s'est portée à sa rencontre. Les sentiments fran­çais comprimés depuis plus de quarante ans se font jour avec une spontanéité touchante. L'accueil si sympathique fait au 18e res­tera inoubliablement gravé dans tous les coeurs et la journée de Bouxwiller demeurera une des grandes journées du Bataillon.

Le lendemain, il faut repartir. Après Bouxwiller, c'est Oberbronn qui fête le 18e, et la réception, pour être moins grandiose, n'en est pas moins touchante. Pendant les cinq journées qu'il passe en ce point, le Bataillon apprend à connaître l'âme alsacienne. On s'attache à cette terre qui porte l'empreinte indélébile de la culture française, et la sympathie pour les frères retrouvés s'établit sans aucun effort. Aussi c'est avec regret que le 18e quitte, le 29 novembre, Oberbronn pour Birlenbach. On sait que la Division doit occuper le Palatinat et la fierté que chacun en ressent compense dans une certaine mesure le regret de ne pas séjourner en Alsace. On va enfin voir le « Boche » chez lui. Le 1er décembre, après avoir traversé le champ du bataille de Wissembourg, le 18e franchit à Altenstadt la frontière de 1870.

Les populations sont inquiètes d'abord, vite obséquieuses dès qu'elles voient qu'aucun mauvais traitement ne leur est infligé. Elles proclament leur indépendance par rapport à la Prusse et même à la Bavière à laquelle elles sont cependant rattachées. Sans la moindre dignité, elles rejettent sur les autres la responsabilité de la guerre et paraissent surtout curieuses de connaître le sort qui leur est réservé. Elles s'attendent à être annexées à la France et n'en paraissent pas fâchées. Ce changement de front, dont le but est trop visible, ne nous les rend pas sympathiques.

Après avoir stationné à Minfeld le 1er et à Rheinzabern le 2, le 18e entre le 3 décembre à Germersheim et prend aussitôt la garde aux ponts sur le Rhin.

La prise de possession de cette ville, garnison allemande du temps de paix, et des forts qui l'environnent est le couronnement de la guerre pour le Bataillon. Il y passe un mois, étonnant par sa belle attitude une population qui s'attendait à être maltraitée en représailles de la conduite des troupes allemandes en France, bien qu'elle ait feint de l'ignorer. Ramené a Neubourg et à Berg aux confins d'Alsace, il y reste jusqu'au 17 février, séjourne encore à Freckenfeld et Dierbach pendant cinq ou six jours et s'embarque enfin le 27 février pour rentrer en France.

*
*      *

Pendant les cinquante et un mois de la guerre, rien n'est venu troubler l'ardeur combative du 18e Bataillon. Animé par la foi patriotique, par ses traditions de corps frontière, par le sentiment de ce qu'il devait à son Arme et à son Numéro, il a imperturbable­ment rempli toutes les missions qui lui ont été confiées et a su se montrer en toutes circonstances impétueux dans l'attaque, tenace dans la défense. Aucune parcelle de la terre de France confiée à sa garde n'a été perdue ; beaucoup, par contre, ont été reconquises par lui.

Fier de son passé, jaloux de ses traditions, conscient d’avoir été en tout l'égal des plus renommés, le 18e a sa part dans la Vic­toire : il aura inscrit de belles pages aux annales des Chasseurs à Pied.

 
 

CHEFS DE BATAILLON
qui ont commandé le 18
e Bataillon de Chasseurs à Pied
depuis le 2 Août 1914

 

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Commandant GIRARD ……………….  31 août 1914.

        -        BRION        1er septembre -         13 nov. 1914.

        -        MAYER        14 Nov. 1914 -         27 janv. 1915.

        -        ESPINOUSE        28 janv. 1915 -         4 mars 1915.

 -  DE TORQUAT DE LA

                     COULERIE         7 mars 1915 -         17 oct. 1916.

 -  VITAL 18 oct. 1916  

CITATIONS OBTENUES PAR LES CHEFS DE CORPS
qui se sont succédés à la tête du Bataillon au cours de la
campagne.

 

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ORDRE GÉNÉRAL N° 16 DE LA IVe  ARMÉE (19 AOUT 1914)

Le Général commandant l'Armée cite à l'ordre de l'Armée les officiers et hommes de troupe dont les noms suivent du 18e B. C. P. :

Chef de Bataillon GIRARD, commandant le 18e B. C. P. :

« Placé en couverture avec son bataillon, a arrêté la cavalerie ennemie, lui a fait subir dans plusieurs escarmouches des pertes sensibles et ne s'est replié que par ordre, devant des forces très supérieures on nombre. »

                                        Signé : DE LANGLE DE CARY.

 

 

ORDRE DU CORPS D'ARMÉE N° 33 (10 NOVEMBRE 1914)

Le Général commandant la IVe Armée cite à l'ordre de l'Armée les officiers et hommes de troupe dont les noms suivent :

Chef de Bataillon BRION :

« S'est particulièrement distingué au combat de Yoncq, où il comman­dait un bataillon du 147e. Nommé au 18e B. C. P., a obtenu de sa troupe des efforts remarquables, notamment à la bataille de la Marne et au combat de La Chalade, où son bataillon a contribué à la destruction de deux bataillons ennemis avec mitrailleuses

« Chargé de la défense du Four-de-Paris, n'a cessé de harceler l'ad­versaire par des actions adroitement combinées d'infanterie et d'artil­lerie qui ont donné les meilleurs résultats ; au moment d'être relevé a demandé à être maintenu sur place pour poursuivre ces opérations offen­sives. »

     Signé : GÉRARD.

 

ORDRE DU CORPS D'ARMÉE N° 87

Le Général commandant la IVe Armée a cité à l'ordre de l'Armée les officiers et hommes de troupe dont les noms suivent :

Chef de Bataillon ESPINOUSE, du 18e B. C. P. :

« Mortellement blessé en suivant l'action de son Bataillon au moment où les chasseurs enlevaient des tranchées ennemies et faisaient prison­nière une compagnie de la Garde. »

     Signé : GÉRARD.

 

Extrait de l’ordre général n° 229, Ire Armée, du 25 juillet 1915

Le Général commandant la Ire Armée cite à l'ordre de l'Armée l'offi­cier supérieur dont le nom suit, du 18e B.C. P. :

Chef de Bataillon DE TORQUAT DE LA COULERIE, commandant le 18e B. C. P. :

« Le 20 juin, debout sur le parapet au milieu des balles et des obus, a lancé son Bataillon de Chasseurs à l'attaque des positions ennemies. A enlevé deux lignes de tranchées et a tenu tête avec énergie jusqu'au 24 juin à de furieuses contre-attaques. Chef de corps d'une chevaleresque bravoure. »

     Signé : Général ROQUES.

 

Extrait de l’ordre de la Xe Armée du 8 octobre 1916

Le Général commandant la Xe Armée cite à l'ordre de l'Armée les gradés et chasseurs dont les noms suivent :

DE TORQUAT DE LA COULERIE, Chef de Bataillon :

« A repoussé de violentes attaques ennemies les 30 et 31 octobre 1915 ; a reconquis, le 21 avril 1916, par une contre-attaque habile, les portions de tranchées perdues le 20 avril à la suite d'une attaque par liquides enflammés. Du 9 au 19 septembre 1916 a enlevé une position compliquée constituée par des chemins creux puissamment organisés et des bois ; a repoussé une contre-attaque sur son flanc gauche complètement découvert et par de judicieuses dispositions a su maintenir intégrale­ment son objectif qu'il avait conquis de haute lutte. »

     Signé : MICHELET.

CITATIONS A L'ORDRE DE L'ARMEE
obtenues par le Bataillon.

 

 

EXTRAIT DE L'ORDRE GÉNÉRAL N° 631

 

Le Général commandant la VIe Armée cite à l'ordre de l'Armée :

Le 18e bataillon de chasseurs à pied,

Solide et superbe Bataillon, à la ténacité et au mordant duquel l'en­nemi lui-même a rendu hommage.

« Sous le commandement du Chef de Bataillon VITAL, a, au cours de dix-sept jours consécutifs de combats opiniâtres (du 17 juillet au 3 août 1918), refoulé l'adversaire sur plus de 30 kilomètres de profondeur, fait 153 prisonniers et conquis 25 mitrailleuses, 1 lance-bombes et 3 lance-flammes. »

Au Q. G. A., le 7 septembre 1918.

                Le Général commandant la VIe Armée, DEGOUTTE

 

 

EXTRAIT DE L'ORDRE GÉNÉRAL N° 1430

 

Le Général commandant la IVe Armée cite à l'ordre de l'Armée :

Le 18e bataillon de chasseurs à pied.

« Magnifique Bataillon qui, dans toutes les circonstances de la guerre, continue à montrer les mêmes vertus militaires.

«Sous le commandement du Commandant VITAL, pendant la période du 28 septembre au 2 octobre 1918, a, par son ardeur dans les attaques, contraint l'ennemi à abandonner les positions les plus solides en lui faisant subir de lourdes pertes.

« A progressé de plus de 5 kilomètres et s'est emparé d'une batterie attelée et de 3 canons de gros calibre, de 34 mitrailleuses lourdes, d'une grande quantité de matériel et de 350 prisonniers. »

                Le Général commandant la IVe Armée, GOURAUD.

OFFICIERS DU 18e BATAILLON DE CHASSEURS A PIED
tombés au Champ d'honneur
entre le 2 août 1914 et le 11 novembre 1918.

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Bataille
de la Marne

(6-11 sept. 1914)

Capitaine DE MAISMONT, Ct la 4e compagnie.

        -        CARRIN, commandant la 7e comp.

        -        PERROT, commandant la 2e compagnie.

Lieutenant LINEL, adjoint au commandant.

Sous-lieutenant         PAGNIEZ, 2e compagnie.

        -         SUEUR, 3e compagnie.

        -        LEFEBVRE (Charles), 4e comp.

Combat de Servon

(15-17 sept. 1914)

Sous-lieutenant        BENOIT, 3e compagnie.

        -        CARUELLE, 2e  compagnie.

        -        GUILLEMONT, 2e  compagnie.

        -        LEFEBVRE (René), 6e  compagnie.

Combat
de La Chalade

(28-30 sept. 1914)

Sous-lieutenant         GENNEVOIS, 5e  compagnie.
        -        PERRAULT DE JOTEMPS, 2
e comp.

Argonne

(Oct. 1914-janv. 1915)

Sous-lieutenant         HUDELIST, 3e compagnie.

Lieutenant ROBERT, 4e compagnie.

Sous-lieutenant         BERTAUX, 3e compagnie.

        -        SCIAMA, 4e compagnie.

Champagne

(Mars 1915)

Sous-lieutenant        WARREN, 6e compagnie.

Commandant ESPINOUSE.

Lieutenant WAHL, commandant la 2e compagnie.

Sous-lieutenant        FRAENCKEL, 1re  compagnie.

        -        TATTET, 1re compagnie.

Tranchée
de Calonne

(20-23 juin 1915)

 

Sous-lieutenant        REGGIANY, 2e compagnie.

        -        SOUCHOY, 4e compagnie.

        -        JEANBLANC, 6e compagnie.

Champagne

(Octobre 1915)

Sous-lieutenant JACQUET, 4e compagnie.

Douaumont

(13-25 avril 1915)

Lieutenant SADON, commandant la 3e comp.

Sous-lieutenant        COLIN, 3e compagnie.

        -        RICHE, 3e compagnie.

Capitaine BONNEF, commandant la 4e comp.

Lieutenant LARDE, 5e compagnie.

Somme

(Juill.-nov. 1916)

Capitaine DROULEZ, commandant la 2e C. M.

Sous-lieutenant        HENRIOT, 2e compagnie.

        -        MONGIN, 2e compagnie.

Lieutenant DRACACCI, 3e compagnie.

Sous-lieutenant PARIS, 5e compagnie.

Germiny

(Janvier 1917)

Sous-lieutenant BECHET, 1re compagnie.

Sapigneul

(Mai 1917)

Capitaine RENARD, commandant la 5e compagnie.

Lieutenant        RICHARD, 5e compagnie.

        -        MENIELLE, 5e compagnie.

Sous-lieutenant        COUSTY, 5e compagnie.

        -        SUAVIN, 1re C. M.

Cote 304

(juill.-août 1917)

Lieutenant DE SAINT-ANGEL, 5e compagnie.

Sous-lieutenant MAITRE, 5e compagnie.

 

Lieutenant PANZANI, détaché aviation.

Aisne

(27 mai-5 juin 1918)

Capitaine SAUBADE, Ct la 4e compagnie.

Lieutenant        DIEU,5e compagnie.

        -        SEEUWS, 5e compagnie.

Sous-lieutenant VALLET, 5e compagnie.

Lieutenant HARDY DE PERINI, Ct la 1re C. M.

Deuxième bataille
de la Marne

(15 juill.-8 août 1918.)

Sous-lieutenant MAGNANT, 3e compagnie.

Troisième bataille de Champagne

(26 sept.- 19 oct.1918.)

Lieutenant SARRAZIN, 5e compagnie.

 

OFFICIERS, SOUS-OFFICIERS, CAPORAUX ET CHASSEURS
du 18
e Bataillon de Chasseurs à pied
tués à l'Ennemi ou disparus présumés tués

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OFFICIERS

SOUS-OFFICIERS

CAPORAUX
et
CHASSEURS

TOTAL

Tués à l'ennemi :

53

157

1.905

2 115

Disparus présumés tués :

1

16

341

958

 

54

173

2 246

2 473

 

 

 

 

 

 

 

 

Edition Originale Numérisée
en Mai 2004
par Stéphane LEVEAU